La rupture. C’est le mot-clé qui ouvre le programme économique du Nouveau Front populaire (NFP). On pourrait ajouter l’empressement. Dans les quinze premiers jours, ce projet promet, entre autres, l’abrogation de la loi sur les retraites, l’augmentation du traitement des fonctionnaires et du smic. Avec, dans la foulée, des lois sur l’éducation, la santé, les services publics, l’écologie ou encore le logement.
Au total, cela représente le lancement d’un plan de dépenses publiques supplémentaires de 100 milliards d’euros d’ici à la fin de 2025 et de 150 milliards d’euros d’ici à 2027, dont les deux tiers en faveur du pouvoir d’achat.
Pour prouver son sérieux en cette époque de disette budgétaire, le programme met en place un plan de recettes fiscales supplémentaires de 150 milliards, qui se veut massivement redistributif puisque visant les très hauts revenus et les grandes entreprises.
Que pensent les économistes de cette rupture de grande ampleur ? Entre Julia Cagé, qui a travaillé sur ce programme et anticipe un effet de relance massif par l’offre de services publics et la réduction des inégalités, et le chef économiste de la banque Oddo, Bruno Cavalier, qui prédit « le Venezuela sans le pétrole » si toutes ces mesures étaient appliquées, il y a toutes les nuances d’appréciation, lesquelles varient grandement selon les modalités d’application qui seront décidées. Passage en revue des trois mesures phares du programme, celles qui enflamment les débats et seront au cœur d’éventuelles alliances.
La mesure : « Dès son arrivée au pouvoir, le Nouveau Front populaire abrogera les décrets mettant en application la réforme des retraites. Durant la législature, [il] organisera une grande conférence avec les partenaires sociaux pour déterminer collectivement les conditions du retour de l’âge légal à 60 ans et du nombre d’annuités associées. »
Chaque mot compte. Comme le souligne l’économiste Michaël Zemmour, l’un des inspirateurs du programme, dans un entretien accordé au Nouvel Obs le 27 juin : « La retraite à 60 ans n’est pas programmée par le NFP, mais apparaît comme un objectif politique. » Et cela change tout. Xavier Timbeau, directeur de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), estime que le coût budgétaire dépend de nombreux paramètres, dont le plus important est la durée de cotisation. « Si on fait passer la durée de cotisation à quarante-cinq ans, au lieu de quarante-deux ans aujourd’hui, avec un passage progressif à quarante-quatre ans, on peut même économiser de l’argent par rapport à la situation actuelle, tout en permettant aux carrières longues de partir dès qu’elles ont tous leurs trimestres », remarque-t-il. La porte reste ouverte face aux partenaires sociaux, même si ces derniers n’ont jamais réussi à s’entendre sur le sujet.