Une grande école de commerce, accessible à tous, sans concours d’entrée et avec un droit d’inscription de 850 euros par an seulement : malgré ces atouts, l’école de commerce Solvay, rebaptisée en 2008 – mondialisation oblige – Solvay Brussels School-Economics & Management (SBS-EM), séduit moins les étudiants français que de nombreuses autres facultés belges, dont celles de l’Université libre de Bruxelles, à laquelle cet établissement prestigieux, fondé en 1903, est intégré.
Ici, dans les quatre bâtiments du campus du Solbosch, à Ixelles, on compte moins de jeunes Français qu’en architecture, en médecine, en journalisme ou en sciences vétérinaires. Ils sont 6 % parmi les quelque 5 000 élèves (dont un quart de non Belges) de « Solvay », comme on appelle communément l’école, en souvenir de son fondateur, l’industriel et mécène Ernest Solvay, découvreur d’un processus de fabrication de la soude qui allait révolutionner la production de métal et de verre au XIXe siècle.
Pas de sélection initiale ou de concours, pas de quotas, pas de dizaines de milliers d’euros à débourser, mais, en contrepartie, des études réputées exigeantes et une sélection rigoureuse à la fin de la première année : « Le taux de réussite est en moyenne de 30 % », dit Bruno Van Pottelsberghe, doyen de l’école et professeur d’économie. A la SBS-EM, on parle effectivement d’« excellence », d’« enseignement rigoureux et exigeant » et d’un objectif : « former les dirigeants de la société de demain ». Des dirigeants évidemment de plus en plus obligés de posséder une maîtrise parfaite de l’anglais, « la » langue du business mondial, auquel une partie importante des 30 000 diplômés de l’école a accédé.
Aussi Solvay a-t-elle décidé d’innover à la rentrée prochaine : dès la première année, ses programmes historiques de « bacheliers » – qui équivalent au bachelor des écoles de commerce françaises – en ingénieur de gestion et de sciences économiques se donneront toujours en français, mais aussi en version anglaise. Dans le premier cas, les cours sont délivrés à 73 % en français, 20 % en anglais, 7 % en allemand et néerlandais ; dans le second, à 80 % en anglais, 15 % en français, 5 % en néerlandais ou allemand – les deux langues officielles de la Belgique, outre le français.
Objectif affirmé de cette duplication : recruter de « nouveaux talents internationaux », dont une centaine est espérée dès cette année, sans toutefois perdre des candidats belges. L’Allemagne et les Pays-Bas (où des restrictions à l’usage généralisé de l’anglais sont envisagées) sont les premières cibles, mais l’espoir est également de convaincre d’autres nationalités, parmi lesquelles des Français, en misant à la fois sur l’originalité des deux filières proposées et le fait qu’elles seront désormais anglicisées.