« Il était improbable qu’une sélection si jeune aille si loin. » Dimanche 14 juillet, peu avant 23 heures, le coup de sifflet final du match Espagne-Angleterre vient à peine de retentir, signant la victoire (2-1) de la Roja, et, les yeux brillants, un sourire indécrochable sur le visage, Ivan Yuste Martin, constructeur de 48 ans, n’en revient pas.
Comme lui, la plupart des Espagnols ont abordé l’Euro 2024 avec modestie. L’Espagne ne partait pas favorite et ses propres supporteurs ne fondaient pas de grands espoirs sur leur sélection nationale. Les six victoires successives de leur équipe puis le triomphe final les ont gonflés d’orgueil. « Nous avons battu la France, l’Italie, l’Allemagne et maintenant l’Angleterre », ajoute à ses côtés Antonio Gamella, 49 ans, propriétaire d’une quincaillerie à Valdemorillo, une ville de 13 000 habitants, à 40 km de Madrid. « Il ne nous reste qu’à vaincre l’Argentine pour gagner une Coupe du monde », conclut M. Martin, rêvant déjà à 2026.
Autour des deux hommes, plusieurs centaines de personnes s’étaient installées plus tôt dans la soirée, dimanche, sur la place de la mairie, pour suivre la finale de l’Euro 2024 sur l’écran géant installé pour l’occasion. Dans cette ville située aux portes des montagnes de la Sierra de Madrid, comme dans un grand nombre de communes du pays, jeunes et moins jeunes ont voulu vivre ensemble la victoire de leur équipe. La plupart portent le maillot de la sélection. Les autres ont accroché le drapeau du pays sur leur dos, comme une cape. Le bâtiment municipal, éclairé de rouge et or, s’est aussi habillé aux couleurs de l’Espagne.
Au milieu du salon de son pavillon, Alvaro Cueto a quant à lui accroché un drapeau de l’Espagne de deux mètres de long avant d’accueillir les trois couples d’amis avec enfants qu’il a invités pour suivre le match. « Cette sélection est très différente de la précédente. Elle est beaucoup plus agréable à voir jouer et plus sympathique », explique ce mécanicien dans l’aéronautique de 46 ans, à la mi-temps, alors que le tableau d’affichage indique 0-0 et que ses nerfs sont à fleur de peau. « Le précédent sélectionneur, Luis Enrique, n’était pas apprécié, il était trop prétentieux. Et le style de jeu, avec des échanges de balles interminables, ne collait pas à l’équipe. Et puis, il y avait trop de stars », explique un ami, Alberto Martinez, 47 ans.
Les Espagnols ne tarissent pas d’éloges sur le nouveau sélectionneur, Luis de la Fuente, en poste depuis décembre 2022, auparavant entraîneur de l’équipe espoirs. Et ils sont tombés amoureux du « gamin » Lamine Yamal, 17 ans tout juste, fils d’un Marocain et d’une Equato-Guinéenne, né dans une banlieue pauvre de Barcelone. « Dans cette nouvelle sélection, ce qui compte, ce ne sont pas les personnalités mais le groupe. Ce mélange de joueurs très jeunes, comme Lamine Yamal et Nico Williams, et de vétérans, comme Carvajal, Morata ou Navas, a permis aux nouveaux de prendre beaucoup d’expérience pendant le tournoi », ajoute Alvaro.