Au Groupama Stadium près de Lyon, football et musique se partagent le terrain

Au Groupama Stadium près de Lyon, football et musique se partagent le terrain

9 janvier 2016. Après dix ans d’un parcours sinueux marqué par de multiples recours administratifs d’opposants au projet, le Parc olympique lyonnais est inauguré à Décines-Charpieu, à une vingtaine de kilomètres de l’historique stade Gerland de Lyon. A quelques mois de l’Euro, la France s’enrichit donc d’une vaste arène pouvant accueillir près de soixante mille spectateurs pour un coût estimé à 405 millions d’euros. Conçu par le cabinet d’architecture américain Populous, spécialisé dans les infrastructures sportives, il compte depuis décembre 2023 une nouvelle voisine : la LDLC Arena, une salle omnisports flambant neuve. Dans les deux lieux, on joue certes au ballon sous toutes ses formes, mais on ouvre aussi grand les oreilles lors de concerts.

Dans les stades contemporains, à l’image du nouvellement nommé Groupama Stadium, le sport constitue désormais un spectacle comme un autre. Le jour où le groupe OL, propriétaire de l’ensemble, est entré en Bourse, en 2007, son PDG, Jean-Michel Aulas, l’a reconnu : « Nous ne sommes pas un club de foot mais une holding de divertissements. » Un positionnement qui marquait l’aboutissement d’une entreprise déjà ancienne, selon Xavier Pierrot, directeur général adjoint de l’OL. « Jean-Michel Aulas a repris le club en deuxième division en 1987, il l’a rapidement fait progresser et l’a structuré comme une entreprise de première division », assure-t-il.

Continuer de faire évoluer l’équipe de football au stade Gerland n’était donc plus conciliable avec cette logique de rentabilité : mis en chantier avant la Grande Guerre, finalement achevé en 1920, le stade a été classé monument historique en 1967, ce qui rendait tous travaux d’agrandissement compliqués. En 2008, Gérard Collomb, le maire de la ville de Lyon, propose au club d’acheter un terrain à l’est de la ville, à Décines-Charpieu, une zone encore champêtre parsemée de petites maisons. Des maisons qui sont aujourd’hui les voisines directes du Groupama Stadium.

André Dargaud a fait partie du collectif de riverains qui a longtemps lutté contre la construction du nouveau stade, anticipant « les nuisances, la circulation, les embouteillages, la pollution…  ». « En tant que citoyen, commente-t-il, nous étions dérangés que des collectivités publiques dépensent plusieurs centaines de millions d’euros et vendent des terrains bien en dessous des prix du marché pour servir des intérêts privés. » L’affaire a été portée devant les tribunaux et elle a vite pris une tournure politique au niveau national. Au point que le maire de Lyon a fait voter un amendement à l’Assemblée nationale pour que le stade soit déclaré « d’intérêt général ».

« Depuis mon jardin, on voit le stade, et surtout ses lumières », constate M. Dargaud aujourd’hui, fataliste. Il entend aussi ce qu’il s’y passe, surtout lors de la trêve estivale, lorsque le ballon laisse la place aux guitares. « Dès que le dernier match est fini, on démonte les sièges et on crée de grands escaliers qui vont permettre au public de passer des coursives à la pelouse, explique M. Pierrot, responsable du Groupama Stadium et de la LDLC Arena. Puis les jardiniers du stade retirent la pelouse, et on pose des plaques de métal pour que les camions puissent rouler dessus. Dans un deuxième temps, on monte les scènes avec les structures pour son et lumière. »

Passer du sport à la musique est un défi technique colossal qui se double d’une gageure : garantir une qualité acoustique minimale. « Un stade n’est à l’origine pas fait pour accueillir de la musique. Beaucoup de spectateurs sont déçus par la qualité des concerts à cause du prix élevé des places et du son qui n’est pas satisfaisant, reconnaît Nicola Sirkis, le leader du groupe Indochine, qui s’est arrêté à Décines-Charpieu lors de sa tournée de l’été 2022. Alors on fait au mieux avec les équipes techniques, les ingénieurs du son, etc. » « Un concert dans un stade, c’est une préparation de presque deux ans, ajoute le chanteur. Plus de mille personnes sur l’installation, dont quatre cents le jour J, quatre-vingts camions en déplacement, des équipes en trois-huit… Il y a une semaine de montage pour trois heures de concert, puis trois jours de démontage. Et ce n’est pas parce qu’on est dans un stade qu’on ne communie pas avec le public. Il y a des moments de grâce ! »

Le 25 juin 2022, le groupe français avait réuni plus de soixante-douze mille fans lors d’une seule soirée sous les projecteurs du stade et sous les étoiles. Coldplay, Rammstein, Taylor Swift fouleront la scène du Groupama Stadium en 2024. Du côté de la LDLC Arena, c’est le britannique Sting qui a inauguré l’autre espace « de divertissement » de l’OL le 13 décembre 2023, un lieu destiné à accueillir toute l’année, au chaud et au sec, aussi bien des artistes que des matchs de basket-ball, de tennis, de futsal… « On peut y organiser des concerts dans des configurations beaucoup plus intimistes avec une meilleure acoustique », se réjouit M. Pierrot. Une intimité toute relative : ce soir d’hiver, l’ex-chanteur de Police a fait salle comble avec quelque douze mille spectateurs aux anges.

Retrouvez tous les épisodes de la série « Archi intéressant ».

La saison 3 du podcast « Archi intéressant » est produite à l’occasion de l’exposition « Il était une fois les stades », présentée du 20 mars au 16 septembre 2024 à la Cité de l’architecture et du patrimoine.

Recomendar A Un Amigo
  • gplus
  • pinterest
Commentarios
No hay comentarios por el momento

Tu comentario