En milieu rural, une basse-cour ne peut être considérée comme constituant un trouble anormal de voisinage, même si le coq se fait entendre de manière énergique dès potron-minet. Il n’en va pas de même d’un élevage d’« appelants », ces oies et canards qui émettent des appels très bruyants à chaque passage d’oiseaux dans le ciel, et qui sont utilisés pour la chasse au gibier d’eau. C’est ce que rappelle l’affaire suivante.

En 2019, M. X, installé depuis 2012 à Longvilliers, petite commune du Pas-de-Calais, se plaint des nuisances sonores que provoque l’introduction, par son voisin, M. Y, d’un élevage d’« appelants » : la soixantaine d’animaux fait du bruit, de jour comme de nuit, dès que des oiseaux passent au-dessus de leur parc.

Après une tentative de conciliation infructueuse, M. X saisit la justice. Le 25 novembre 2021, le tribunal de proximité de Montreuil-sur-Mer ordonne à M. Y de supprimer l’élevage de volatiles « qu’il détient illégalement » (faute de déclaration administrative), dans un délai de soixante jours. Il le condamne à payer 1 000 euros à son voisin, en réparation du préjudice qu’il lui a causé, et à lui rembourser ses frais d’huissier, d’expertise et d’avocat (3 187 euros), avec exécution provisoire.

Celui-ci n’exécute que les condamnations financières et fait appel, grâce à l’aide juridictionnelle. Il conteste l’existence des nuisances sonores. De plus, affirme-t-il, « nous sommes à la campagne, donc il est normal d’entendre par moments nos divers animaux, que ce soit coq, canard, cheval, oie, mouton, chien, etc. ; en aucun cas ces bruits ne sont des nuisances sonores au sein d’un village ».

M. Y ajoute qu’il « adhère à la notion de patrimoine sensoriel ». Une allusion à la loi du 29 janvier 2021 visant à définir et à protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises, qui a ajouté « les sons et les odeurs » aux éléments caractérisant le « patrimoine commun de la nation » (article L 110-1 du code de l’environnement).