C’est une licorne blanche et rose, douce au toucher. En mémoire de Julie, une de ses amies a offert à sa famille cette peluche, souvenir d’une enfance heureuse, pas si lointaine. La créature légendaire trône sur une table, à l’entrée de la nef. Déplié juste à côté, un sac de toile avec la mention « Dubaï ». A l’autre bout de l’église, face à l’autel, le cercueil a été posé. Dessus, une photo encadrée. Sur l’image, une jeune femme, longs cheveux blonds, sourit légèrement devant un décor de gratte-ciel dubaïotes. Au pied de l’autel, à côté de gerbes de fleurs, une inscription précise : « Julie Pospieszny, 2003-2025 ».

En cette matinée du 18 mars, derrière les murs en brique de l’église Saint-Amé de Liévin (Pas-de-Calais), au cœur d’une ancienne cité de corons, c’est une enfant du pays, née dans la ville voisine de Lens, qu’on enterre. Une fille d’ici qui rêvait d’ailleurs. Ils sont environ 200 à assister aux obsèques. Dehors, le soleil, éclatant, réchauffe l’air. A l’intérieur, les vitraux représentant des mineurs de fond filtrent une douce lumière. Assis au premier rang, un homme à la silhouette massive porte des lunettes noires, pour masquer ses yeux rougis.

Les notes de Yesterday au clavecin résonnent sous la voûte. Après quelques paroles du prêtre, Jérôme Pospieszny se lève jusqu’au pupitre. « Notre fille, notre bébé… Je parle ici pour moi, pour ta mère, pour ta sœur », commence-t-il, en regardant son ex-épouse et sa fille. Les mots du père tremblent, un sanglot lui échappe. Il évoque l’« immense bonheur » des moments partagés, les premières vacances en Ardèche, le temps passé bien trop vite. « Toute seule, tu t’es acheté ton propre appartement, ta propre voiture. Toute seule, tu voyageais, tu t’es enrichie de la Thaïlande, de la Grèce, de l’Espagne, de Dubaï. Quelle fierté d’avoir été ton papa ! Quelle fierté pour ta mère et ta sœur de te compter parmi nous. Tu sais, Julie, tu nous as fait grandir, ta mère et moi, dès le premier jour. Et maintenant aussi. »