« Choose Europe for Science » : au moment où Donald Trump s’attaque à la recherche et à l’université, l’appel lancé début mai par le président Emmanuel Macron, à la Sorbonne, semble clair. Face aux défis démocratiques, économiques, climatiques et démographiques, l’Europe et la France doivent accueillir une recherche d’excellence internationale, y compris venue des Etats-Unis. D’ailleurs, les chefs d’entreprise, présents lors de cet événement, ont bien saisi l’intérêt de cet appel et témoigné de l’importance stratégique de la recherche, d’où qu’elle vienne.
Car face à un taux de natalité historiquement bas, un PIB [produit intérieur brut] par habitant qui décroche par rapport à celui des Etats-Unis et une exposition particulièrement forte aux conséquences du changement climatique, l’Europe doit réagir, avec l’appui du monde de la recherche. L’annonce d’une enveloppe de 100 millions d’euros pour attirer les talents venus des Etats-Unis soulève toutefois bien des questions, structurantes et de plus long terme.
D’abord parce qu’elle intervient juste après l’annonce de la baisse de près de 1 milliard d’euros du budget consacré à l’enseignement supérieur et de la recherche en France, dont 100 millions pour le seul CNRS. Dans un contexte où l’Etat se désengage du financement de la recherche indépendante sur des sujets cruciaux, parmi lesquels celui des migrations, comment l’initiative d’attirer des chercheurs américains – aujourd’hui eux-mêmes entravés dans leur pays – pourrait-elle être perçue comme autre chose qu’un geste politique ? Plutôt que de multiplier les annonces, il est urgent d’accorder à la recherche sur les migrations les moyens réels dont elle a besoin pour éclairer nos choix collectifs et renforcer notre avenir démocratique.
Ensuite, parce qu’elle interroge sur l’attractivité de notre pays pour les étrangers, et sur notre capacité à les faire participer à la création de richesse. Car, quoi qu’en disent certains, la France n’est pas – ou n’est plus – le pays dont rêvent les migrants. N’oublions pas que l’une des forces des Etats-Unis, avant la présidence Trump, a été d’attirer les talents du monde entier. C’est une dynamique que la France peine à reproduire.