Paris Fashion Week : Jonathan Anderson ouvre un chapitre prometteur pour Dior Homme

Dans la mode, l’année 2025 ouvre un nouveau cycle : pendant les fashion weeks de septembre et d’octobre, une dizaine de marques majeures vont présenter la première collection de leur nouveau designer. Dior prend de l’avance sur la concurrence, avec le défilé homme de son nouveau directeur artistique, Jonathan Anderson, organisé le 27 juin, à Paris, dans le cadre de la fashion week printemps-été 2026.

Nommé au début du mois à la tête des lignes féminines et masculines, le Britannique de 40 ans occupe une position inédite dans l’histoire de la maison, puisque personne, avant lui, n’avait eu la charge de l’ensemble de la mode Dior. Le succès de sa marque J. W. Anderson, et ses onze années chez Loewe, une autre maison du groupe LVMH, ont convaincu le groupe de lui confier ce poste-clé. Si son talent et sa capacité de travail ne font aucun doute, il reste une interrogation : le designer, connu pour sa créativité débridée, saura-t-il s’adapter à Dior, qui propose une mode plus classique ?

Pour présenter sa collection inaugurale, Jonathan Anderson a fait monter une immense boîte rectangulaire sur l’esplanade des Invalides. Sa façade extérieure reproduit une photo distordue du salon de couture historique de Christian Dior, au 30, avenue Montaigne, à Paris. Malgré la taille imposante de la structure, le nombre de places a été divisé par deux par rapport aux saisons dernières, avec seulement 600 invités. Un rétrécissement qui correspond à la volonté de Dior de se positionner comme une marque plus exclusive dans les années à venir.

Le comité restreint est aussi une contrainte liée au décor, qui reproduit fidèlement une salle de la Gemäldegalerie, à Berlin, du parquet de bois blond aux murs tendus de velours qui, en absorbant la lumière, permettent aux œuvres de dégager toute leur intensité chromatique. Ici, seulement deux peintures ponctuent l’espace : il s’agit de natures mortes de Jean Siméon Chardin (1699-1779), Le Panier de fraises, emprunté au Louvre (dont LVMH est mécène), et Un vase de fleurs, prêt des National Galleries of Scotland. Chardin fait partie des peintres favoris de Jonathan Anderson, parce qu’il y a, chez lui, « une approximation qui annonce l’impressionnisme », s’enthousiasme le designer.

On perçoit l’importance de ce défilé dans le choix des invités : Bernard Arnault, PDG de LVMH, est assis à côté de Rihanna (trois jours plus tôt, au défilé Louis Vuitton, il était le voisin de Beyoncé). Les stars sont nombreuses et de tous horizons (le joueur de tennis Roger Federer, le groupe de K-pop TXT, les acteurs Robert Pattinson et Daniel Craig, la chanteuse Sabrina Carpenter, etc.). Les designers de mode sont aussi légion, certains du groupe (Pharrell Williams, Michael Rider, Lazaro Hernandez et Jack McCollough), d’autres non (Donatella Versace et même Kris Van Assche, qui pilota Dior Homme pendant onze ans). On croise aussi des directeurs de musée (du Louvre, de la Gemäldegalerie). Une foule disparate, mais liée par un point commun : Jonathan Anderson, pour qui la pression est maximale.

Les volumes étonnants et les nombreux drapés de la première silhouette à sortir des coulisses font d’emblée penser à son travail pour Loewe. Elle fait pourtant référence à l’histoire de Dior : la veste s’arrondit sur les hanches, comme celle du fameux tailleur féminin Bar que Christian Dior imagina en 1947, emblématique de l’allure New Look. Le short cargo, dont l’arrière est lesté de panneaux de tissus pliés en deux comme une traîne rectangulaire, est une référence à la robe Delft de l’automne-hiver 1948-1949. « Quand je me suis demandé comment élargir les horizons de la maison, j’ai repensé à Christian Dior, qui, au sortir de la seconde guerre mondiale, a plongé dans le passé pour créer le New Look », explique Jonathan Anderson.

Les références historiques ne se cantonnent pas aux archives du fondateur. Jonathan Anderson transpose allègrement le vestiaire du XVIIIe siècle, avec des vestes en velours à queue-de-pie, des gilets brodés, des cols blancs ornés d’un nœud. « Certaines vestes sont des répliques exactes de modèles de 1720. Pour moi, il n’y a pas d’intérêt à les moderniser, je préfère les montrer comme des reliques de ce que la France a été », tranche-t-il. Il les associe à des éléments contemporains faciles à porter, des jeans délavés, des pantalons baggys, des sandales en veau velours ou des baskets aux lacets dénoués. Il propose aussi des silhouettes plus simples, comme un caban marine avec un pantalon beige. Expérimentale mais aussi casual, cette collection séduisante semble ne pas choisir son camp et laisser à Jonathan Anderson différentes options pour l’avenir.

Le Britannique dit ne pas vouloir enfermer Dior dans une esthétique et souligne l’importance de « créer des personnages ». « Etre en Dior, c’est avoir du style. C’est pour ça que j’ai choisi des portraits de Jean-Michel Basquiat et de [la mondaine] Lee Radziwill [pour la première campagne de publicité]. Ils n’ont rien à voir l’un avec l’autre, venaient de milieux complètement différents. Mais ils avaient de l’allure. » Sur ce point, le designer remporte son pari : ses mannequins, qu’ils portent une veste Louis XV ou une veste en jean avec une cravate à rayures, attirent l’attention, rompant avec la mode lisse de Kim Jones, son prédécesseur.

Ce défilé pose les bases du travail de Jonathan Anderson chez Dior, mais ce n’est qu’un début : le designer devra aussi imaginer le prêt-à-porter et la haute couture femme, ainsi que des précollections. « Chaque chapitre sera différent. Et l’histoire ne sera pas complète tant qu’on ne les aura pas tous écrits », prévient le Britannique. La rentrée s’annonce décidément palpitante.

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