Ce 5 ?juin à 10 heures, au 16 de la rue de la Calade à Arles, le camion arrive enfin. Il a quitté Grasse à l’aube, mais dans cette petite voie passante du centre historique, la livraison de la précieuse cargaison s’avère ardue. C’est un jour important, car une trentaine de mannequins vont rejoindre le futur Musée Fragonard de la mode et du costume. Dans un premier temps, ils seront logés dans les réserves du troisième étage, où vont cohabiter bibliothèque, atelier de restauration et bureaux. Leurs accessoires suivent, rangés dans de grandes boîtes en carton, une seule tenue pouvant en nécessiter une vingtaine.
Poussées sur des chariots, ces énigmatiques silhouettes couvertes de housses blanches font s’interroger une passante amusée : « Mais qu’est-ce que c’est ? Des fantômes ? » A tout juste un mois de l’ouverture, plusieurs corps de métiers apportent les dernières touches au chantier. Au sein des équipes, la fébrilité est à son comble. Grand ordonnateur des opérations, le directeur du musée et des collections textiles, Clément Trouche, n’en laisse rien paraître et salue chacun d’un mot gentil.
Parfumeur grassois emblématique depuis 1926, la maison Fragonard est aujourd’hui dirigée par la quatrième génération d’une lignée de passionnés et de collectionneurs. L’enseigne compte en France, en plus de ses trois sites de production, de 25 boutiques et d’une maison d’hôte (à Arles), plusieurs musées à Grasse et à Paris, dont un consacré au peintre et gantier grassois Jean-Honoré Fragonard, ainsi que le Musée provençal du costume et du bijou (les deux à Grasse). Ce dernier, inauguré en 1997, fut créé pour l’importante collection constituée par Hélène Costa (morte en 2007), dont les trois filles – Agnès, Françoise et Anne – assurent actuellement la direction de l’entreprise familiale.