La juge Isabelle Prévost-Desprez : « J’ai beaucoup embêté mon père avec mon féminisme »

Isabelle Prévost-Desprez, 66 ans, est l’une des juges anticorruption les plus connues du grand public, inflexible et crainte des avocats. Aujourd’hui numéro deux du tribunal de Paris, elle revient sur une carrière marquée par les grandes affaires politico-financières, dont l’affaire de vente d’armes à l’Angola, dite « Angolagate », ou le feuilleton Bettencourt sous la présidence de Nicolas Sarkozy, et les dossiers terroristes. Un parcours semé de tentatives de déstabilisation des pouvoirs politique et économique.

… Si je n’avais pas résisté à la pression dans l’affaire Bettencourt. J’ai eu face à moi un président de la République qui attaquait mon impartialité. Un 14-Juillet, ma mère m’avait appelée, affolée : « Nicolas Sarkozy vient de parler de toi à la télé ! » A l’époque, je disais : moi, je ne suis qu’une juge. Puis j’ai compris que les moyens de l’Etat allaient être utilisés. Une enquête a été ouverte contre moi pour violation du secret professionnel, pour me dessaisir du dossier. Résister à ça, c’était incarner une forme d’indépendance. Je n’ai pourtant jamais eu ni ce but ni cette volonté.

Personne ne pense un instant que j’ai été déloyale. C’était de la manipulation. Mais quand j’ai été mise en examen et renvoyée devant le tribunal correctionnel, ça a été difficile à vivre. Je continuais à exercer, il y avait une perquisition à mon domicile et le lendemain hop, je présidais une audience. On s’étonnait : « Madame le président, en plus vous êtes là ! » Eh bien oui, je continue. J’ai vécu ce type de pression depuis que j’ai commencé à traiter des dossiers liés à la sphère politique ou financière. Etre juge d’instruction, c’est être seul. On prend des décisions solitaires, contrôlées ensuite par la cour d’appel. On ne peut en parler à personne.

Recomendar A Un Amigo
  • gplus
  • pinterest
Commentarios
No hay comentarios por el momento

Tu comentario