Harcèlement chez Ubisoft : trois anciens cadres condamnés à des peines allant jusqu’à trois ans de prison avec sursis

Le tribunal correctionnel de Bobigny a condamné, mercredi 2 juillet, à des peines allant jusqu’à trois ans de prison avec sursis trois anciens cadres d’Ubisoft pour harcèlement moral ou sexuel au sein du géant des jeux vidéo.

Reconnu coupable de harcèlement moral, sexuel et d’une tentative d’agression sexuelle, Thomas François, ancien vice-président du service éditorial du fleuron français du jeu vidéo, a été condamné à trois ans de prison avec sursis et 30 000 euros d’amende. L’ex-numéro 2 d’Ubisoft, Serge Hascoët, a été condamné à 18 mois de prison avec sursis et à 45 000 euros d’amende. Ancien game director, Guillaume Patrux a été condamné à 12 mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende.

Parmi les faits reprochés à l’ancien vice-président du service éditorial d’Ubisoft : contraindre une jeune femme en jupe à faire le poirier au milieu de l’open space, lancer des « bitch » ou « morue » en guise de salut, « jouer » à « chat-bite » ou embrasser des collègues masculins par surprise. La « culture Ubi » a été un calvaire pour la poignée de jeunes ayant brisé le silence et porté plainte dans ce dossier, qui fait figure d’un MeToo des jeux vidéos.

En se constituant parties civiles, un petit groupe de personnes solidaires s’est constitué et s’est renforcé au fil des douloureux témoignages et des interrogatoires recueillis par le tribunal correctionnel de Bobigny lors de l’audience.

Thomas François, qui avait entre 38 et 46 ans au moment des faits retenus par la justice entre 2012 et 2020, a confessé à la barre avoir « manqué de recul », ayant eu, « à l’époque, l’impression d’être dans le respect des gens ». Quant à Serge Hascoët, il a affirmé au tribunal n’avoir jamais entendu les propos sexistes ni avoir eu connaissance des bizutages dégradants qui se déroulaient à quelques mètres de son bureau vitré.

Numéro 2 d’Ubisoft en sa qualité de directeur créatif, il avait démissionné à l’été 2020 dès que les enquêtes du quotidien Libération et du média en ligne Numérama avaient révélé la situation.

Le tribunal a pu constater les difficultés que l’homme, aujourd’hui âgé de 60 ans, pouvait avoir à séparer vie privée et vie professionnelle, demandant à ses employées d’effectuer des tâches personnelles sans lien aucun avec leurs compétences, telles qu’aller chercher sa plus jeune fille de six ans à la sortie de l’école ou traverser Paris pour acheter des cacahuètes à coque… Malgré leur fonction d’assistantes de direction, elles ont été contraintes à ces « caprices », comme l’a qualifié le ministère public. « C’est aussi ce qu’on voit dans les films », s’est défendu Serge Hascoët devant le tribunal, dont la présidente, atterrée, lui a signalé : « Les films, ce n’est pas la réalité. »

Dans son réquisitoire, le procureur avait précisé que les actes de harcèlement moral de M. Patrux avaient eu lieu « à une échelle plus réduite que [ceux de] Serge Hascoët et Thomas François, mais particulièrement intense pour son équipe ».

Durant le procès, les avocats de la défense n’ont eu de cesse de répéter que leurs clients n’avaient jamais reçu « aucun avertissement disciplinaire, aucun entretien avec les RH ».

Au grand dam de toutes les parties, ni la personne morale Ubisoft, ni son PDG, Yves Guillemot, ni sa responsable des ressources humaines, Marie Derain, n’ont fait l’objet de poursuites dans ce dossier.

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