La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), le « gendarme » de la protection des données, a jugé l’utilisation de caméras « augmentées » dans les bureaux de tabac pour évaluer l’âge des clients « ni nécessaire, ni proportionnée », dans un avis publié vendredi 11 juillet.
Ces caméras, équipées de logiciels fondés sur l’intelligence artificielle (IA), sont utilisées dans le cadre de la vente de produits interdits aux mineurs, tels que les cigarettes, l’alcool ou les jeux d’argent. De tels outils d’estimation de l’âge à base d’analyse des traits du visage sont de plus en plus répandus pour vérifier la majorité ou non d’une personne, le plus souvent pour accéder à des services en ligne pour adultes.
Des dispositifs ont ainsi été déployés dans des bureaux de tabac depuis quelques années dans le cadre de plusieurs tests. A la fin de 2024, la Fédération Paris?-?Ile-de-France des buralistes annonçait par exemple avoir lancé une expérimentation dans 14 établissements. « A la suite de plusieurs demandes », la CNIL a évalué la conformité de ces dispositifs à la loi française et au règlement européen sur la protection des données (RGPD), et a tranché en leur défaveur.
« L’analyse préalable du visage des personnes par une caméra pour estimer leur âge n’apparaît pas nécessaire », car la vérification des pièces d’identité reste le seul moyen de s’assurer de la majorité des clients, estime l’autorité dans son avis. Ces dispositifs sont par ailleurs jugés disproportionnés car les caméras tournent et traitent en continu les images des clients se rendant au bureau de tabac. En parallèle, elle souligne que le « déploiement [de ces outils] dans des lieux de vie comme des bureaux de tabac contribue à un risque de banalisation et d’habituation à une forme de surveillance renforcée par la multiplication de tels outils ».
Sollicitée par l’Agence France-Presse (AFP), l’autorité a toutefois précisé qu’« en l’absence de plainte de personnes concernées, à ce jour, la CNIL souhaite laisser le temps aux buralistes concernés de se mettre en conformité ». De son côté, la Confédération nationale des buralistes a répondu à l’AFP « prendre acte » de l’avis de la Commission. Elle s’exprimera sur le sujet dans les prochains jours.
Dans une réaction transmise à l’AFP, l’Alliance contre le tabac s’est, de son côté, félicitée de cet avis. « Le déploiement de dispositifs de vérification d’âge chez les buralistes ne constitue en aucun cas une réponse satisfaisante au non-respect de l’interdiction de vente des produits du tabac et de vapotage aux mineurs », a-t-elle fait valoir.