Au moins 63 personnes sont mortes de malnutrition en une semaine à El-Facher, ville assiégée dans l’ouest du Soudan en guerre, a rapporté, dimanche 10 août, à l’Agence France-Presse (AFP) un responsable du ministère de la santé. « La plupart sont des enfants et des femmes », a-t-il affirmé sous couvert d’anonymat. Ce bilan ne concerne que les personnes ayant pu atteindre l’hôpital, alors que de nombreuses familles enterrent leurs proches sans soins, faute de sécurité et de moyens de transport.

El-Facher, capitale du Nord-Darfour, est assiégée depuis plus d’un an par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), en guerre contre l’armée depuis avril 2023. Dernière capitale régionale du Darfour toujours tenue par l’armée, elle a récemment subi de nouvelles attaques des FSR, repliées vers l’ouest après la perte de la capitale Khartoum en mars.

En avril, une attaque contre le camp de déplacés de Zamzam, en périphérie d’El-Facher, avait provoqué un exode massif de civils vers cette ville. A Abou Chouk, un camp voisin d’El-Facher où la famine a été déclarée en 2023, entre cinq et sept enfants meurent chaque jour.

La ville est totalement isolée : les marchés sont vides, les denrées rares et hors de prix. Un sac de 100 kg de farine de millet atteint 11 millions de livres soudanaises (environ 1 600 euros). Les conditions humanitaires y sont catastrophiques. Dans la principale cantine populaire, les rations ont drastiquement diminué : une assiette de bouillie traditionnelle partagée auparavant entre trois personnes l’est aujourd’hui entre sept.

Environ 1 700 personnes viennent chaque matin y recevoir cette unique portion, sans garantie de satiété. Magdi Youssef, responsable de la cantine, observe chez les enfants et les femmes des signes manifestes de malnutrition, comme « des ventres gonflés et des yeux globuleux ». « Certains centres ne trouvent même pas de farine de mil ou de maïs et se résignent à moudre les résidus de tourteaux », normalement destinés au bétail, raconte-t-il à l’AFP.

De nombreuses familles, comme celle de Hachim Haroune, 44 ans, n’ont plus d’autres choix que de consommer du fourrage : « Le soir, ma femme prépare un plat à base de résidus de tourteaux (…) que les enfants boivent au coucher du soleil avant de dormir », témoigne ce père de sept enfants. « Ma femme et moi, nous nous contentons du repas du centre. »

Près de 40 % des enfants de moins de 5 ans à El-Facher souffrent de malnutrition aiguë, dont 11 % sous forme sévère, selon le Programme alimentaire mondial (PAM). Dans un pays où les combats bloquent les routes et paralysent la logistique, l’acheminement de l’aide humanitaire est quasi impossible. Les convois sont à l’arrêt, les réserves s’amenuisent. Et la saison des pluies, qui s’intensifie en août, aggrave la situation.

A l’hôpital d’El-Facher, les enfants arrivent souvent « dans un état critique », alerte une pédiatre. Les stocks médicaux sont presque épuisés. « La plupart présentent une malnutrition aiguë. » Sans approvisionnement rapide, prévient-elle, « nous ne pourrons rien faire pour les enfants ».

Entré dans sa troisième année, le conflit a fait des dizaines de milliers de morts, déraciné des millions d’habitants et provoqué ce que l’ONU qualifie de « pire crise humanitaire au monde ». Près de 25 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire aiguë à travers le pays.

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