Vieillir dans une banlieue populaire, une triple peine et un « impensé » politique

Monique (elle n’a pas souhaité donner son nom de famille) est une femme prévoyante. A 62 ans, cette fonctionnaire prépare déjà sa retraite, prévue pour 2026. Elle n’avait jamais imaginé construire un jour un jeu de passe-trappe en bois de ses propres mains. C’est chose faite : cet après-midi du mois de juillet, Monique s’est inscrite sur un coup de tête à l’atelier bricolage au sein du tiers-lieu Masaryk, à Sevran (Seine-Saint-Denis), la ville où elle réside depuis la fin des années 1990.

Ce nouvel espace intergénérationnel a été inauguré fin avril dans le cadre d’un projet d’habitat inclusif, destiné à lutter contre l’isolement des personnes âgées et en situation de handicap. Monique fréquente les locaux, situés au rez-de-chaussée d’un immeuble de 300 logements réhabilités, depuis leur ouverture. Ils abritent une épicerie sociale, un piano et une bibliothèque partagés, un espace de coworking, une cuisine ouverte, un salon commun, une salle d’animation avec atelier cuisine, peinture, karaoké, jardinage… « Je ne veux pas me retrouver seule, sans rien à faire et nulle part où aller, coincée dans un appartement qui ne correspond plus à mes besoins », dit-elle.

C’est l’un des défis majeurs des quartiers populaires : le vieillissement de leur population. Un phénomène que personne n’a vu venir, tant on dit et pense les banlieues comme des espaces « jeunes », et auquel elles ne sont pas préparées. Dans un rapport publié en mars et intitulé « Paroles de vieux de banlieue : des territoires du mal vieillir », l’association les Petits Frères des pauvres relevait que la part des personnes de plus de 60 ans dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (dits « QPV ») était la seule en hausse constante depuis les années 1990, et représente aujourd’hui plus de 18 % des habitants.

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