Ce devait être l’apothéose d’une saison, marquée par un engouement populaire de plus en plus important pour la ligue féminine de basket nord-américaine. Mais le premier match des finales WNBA, opposant les Las Vegas Aces au Phoenix Mercury, vendredi 3 octobre – victoire de la franchise du Nevada 89-86 –, a été éclipsé par le climat de tensions entre les joueuses et la direction de l’instance. La WNBA « a les meilleurs athlètes et les meilleurs fans, mais le pire leadership », avait ainsi lancé quelques jours plus tôt, en conférence de presse, l’ailière forte des Minnesota Lynx, Napheesa Collier, par ailleurs vice-présidente du syndicat des joueuses (WNBPA)
Leurs griefs sont nombreux. Il y a d’abord l’arbitrage, qui, aux dires de Napheesa Collier, « atteint un niveau d’inconsistance qui fait du mal au basket et à son intégrité ». Lors du match 4 des demi-finales, le 28 septembre, face à Phoenix, cette dernière avait dû sortir, touchée à la cheville après un choc avec une adversaire. Or, aucune faute n’avait été signalée, ce qui avait provoqué la colère de l’entraîneuse des Lynx, finalement exclue et suspendue pour avoir protesté.
Avant cet incident, Napheesa Collier avait déjà eu l’occasion de discuter de ce sujet avec la patronne de la Ligue, Catherine Engelbert, en février. Cette dernière lui aurait rétorqué : « Seules les perdantes se plaignent de l’arbitrage. »
La championne olympique lors des Jeux de Paris 2024 a également révélé, lors de sa conférence de presse, qu’elle avait évoqué avec Catherine Engelbert la question des émoluments des jeunes recrues prometteuses, jugés trop bas, à l’instar de Caitlin Clark, la pépite de l’Indiana Fever. Là encore, la réponse fut sèche : « Caitlin Clark n’aurait jamais signé un contrat de sponsoring pour 16 millions de dollars [13,6 millions d’euros, avec l’équipementier Nike] sans la WNBA. »
Plus largement, les négociations pour la prochaine convention collective (CBA) sont au point mort depuis plusieurs mois. Les basketteuses demandent une revalorisation de leurs salaires au regard du gain de popularité du championnat. Mi-août, à plus d’un mois de la fin de la saison, la WNBA annonçait avoir dépassé les 2,5 millions de spectateurs, son précédent record établi en 2002. Ses revenus sont passés de 102 millions de dollars en 2019 à 200 millions cette année. Or, rappelle le site MarketWatch, les joueuses ne perçoivent que 9,3 % des revenus générés par la Ligue, quand la proportion avoisine les 50 % chez leurs homologues masculins de la NBA.
Les basketteuses ont à plusieurs reprises exprimé leur colère sur les réseaux sociaux ou en match, comme lors de l’échauffement du All-Star Game, le 20 juillet, où elles arboraient des tee-shirts floqués du slogan « Pay us what you owe us » (« Payez-nous ce que vous nous devez »). La nouvelle CBA doit être ratifiée le 31 octobre, mais à ce jour aucune solution n’a été trouvée. A un peu moins d’un mois de la date butoir, le championnat risque de vivre le premier « lock-out » de son histoire, c’est-à-dire une cessation complète d’activité le temps de trouver un accord.
Les propos de Napheesa Collier ont été massivement salués et soutenus par ses pairs. De son côté, la patronne de la Ligue a estimé, vendredi, que ceux-ci comportaient de « nombreuses inexactitudes », se disant toutefois « attristée d’apprendre que certaines joueuses ont le sentiment que la Ligue ne se soucie pas d’elles et ne les écoute pas ». Et Catherine Engelbert d’ajouter : « Si elles ne se sentent pas appréciées et valorisées alors nous devons faire mieux, et je dois faire mieux. » La balle est désormais dans le camp de la WNBA.