Olivier Bargain et Jean-Marc Figuet : « Les leaders de gauche doivent abandonner leur posture actuelle : tout le programme, rien que le programme »

Un besoin de justice sociale est exprimé par un grand nombre de concitoyens qui se sentent, à juste titre, victimes de la mondialisation quand d’autres en ont largement profité. De ce déclassement bien réel découle en partie la montée du vote de désespoir en faveur des extrêmes. Cette colère aurait pu être apaisée si le macronisme avait inclus un volet social.

Un vrai « en même temps » aurait d’ailleurs rendu la politique d’offre menée ces dernières années plus pérenne, en limitant le risque de frondes répétées et paralysantes (« gilets jaunes », opposition à la réforme des retraites, etc.). A l’inverse, on assiste peut-être à l’effondrement de sept années d’efforts pour gagner la confiance des investisseurs étrangers, et les récifs se rapprocheront d’autant plus vite que le coup de barre à gauche sera brutal. La menace est celle-ci : qu’Emmanuel Macron mette maintenant le Nouveau Front populaire (NFP) au défi d’appliquer son programme.

Premièrement, il serait illusoire de croire dans l’équilibre budgétaire d’un programme chiffré très rapidement et sans prise en compte des impacts économiques. Les calculs sur la hausse du smic, par exemple, n’intègrent pas la hausse concomitante des défaillances d’entreprises et leur coût économique et social. Des hausses d’impôts brutales et généralisées peuvent décourager l’investissement et l’effort productif, se soldant par de moindres recettes fiscales.

Enfin, les effets bénéfiques de la relance budgétaire mis en avant par le NFP sont plus qu’incertains, avec la fuite probable d’une partie de la relance vers les importations et la montée de l’inflation si l’offre de nos entreprises ne satisfait pas la hausse de la demande. Ces conséquences sont bien connues des économistes, quelle que soit leur chapelle.

Deuxièmement, comment oublier la contrainte extérieure ? Les mesures sociales de 1936 ou 1981 avaient systématiquement conduit à une hausse des taux d’intérêt, devenus intenables pour un gouvernement obligé d’emprunter pour fonctionner. Et encore, à cette époque, la dette publique était faible – autour de 20 % du PIB, contre 110 % aujourd’hui). La relance s’était pourtant traduite par un inexorable « tournant de la rigueur » deux ans plus tard, un délai que nous n’avons même plus aujourd’hui. En 2022, au Royaume-Uni, l’annonce de fortes baisses d’impôts, budgétairement déraisonnables dans un contexte d’endettement élevé, avait conduit à une explosion des taux d’intérêt et à la chute du gouvernement de Liz Truss en une petite semaine.

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