Si la fréquentation des salles obscures fait triste mine en cette fin d’année 2025, l’offre cinématographique s’est révélée d’une grande diversité, avec des propositions captivantes aussi bien dans le registre du thriller, du biopic, de l’animation ou de l’œuvre expérimentale. Nos critiques présentent leur palmarès personnel.
1. « Un poète », de Simon Mesa Soto
2. « Une bataille après l’autre », de Paul Thomas Anderson
3. « Tardes de soledad », d’Albert Serra
4. « L’Aventura », de Sophie Letourneur
5. « Nouvelle Vague », de Richard Linklater
Grande révélation de l’année : le Colombien Simon Mesa Soto. Son deuxième long-métrage, Un poète, est une farce tragique. Alors qu’il paraît enclavé dans le panier de crabes des littérateurs de Medellin, il rend compte, avec une formidable vigueur, du bouleversement de fond de la culture, au sens le plus large – qui paraît ici avoir perdu le nord. Albert Serra a aussi cela en tête, sans doute, dans Tardes de soledad, en nous enfermant dans les arènes et les coulisses de la corrida, tout en laissant hors champ le public. En se vouant à des activistes américains déboussolés et essoufflés, Paul Thomas Anderson leur fait un flamboyant bouche-à-bouche et s’impose sans peine du côté hollywoodien. Comparés aux deux colosses lusophones de 2025 (Le Rire et le Couteau, du Portugais Pedro Pinho ; L’Agent secret, du Brésilien Kleber Mendonça Filho), nos deux derniers choix peuvent paraître plus frivoles ou légers. Il ne s’agit pas seulement de se changer les idées. L’Aventura, de Sophie Letourneur, est aussi drôle que grave sur la folle équipée qu’est une famille – registre qui peine ailleurs à échapper à la sociologie illustrée. Nouvelle Vague, de l’Américain Richard Linklater, biopic badin, soixante-cinq ans après, du tournage d’A bout de souffle, de Jean-Luc Godard, cultive certes une joliesse pop. Il ne relève toutefois pas de la seule nostalgie. Il faut le voir comme une cure de jeu, de joie, d’enfance, ou comme une bonne chanson de variété (ce que devient peut-être l’histoire du cinéma). Son refrain reste en tête :« Moteur, Raoul.– Ça tourne, Jean-Luc. »Même si le monde tourne aujourd’hui assez mal.