Donald Trump n’avait pas attendu son retour formel à la Maison Blanche, le 20 janvier, pour peser sur les affaires du monde. Il n’est donc pas prématuré de dresser un bilan de sa première année au pouvoir. Le même homme qui assurait que son succès serait mesuré autant par les guerres qu’il empêcherait que par celles qu’il ne commencerait pas n’a pas toujours tenu parole. En un an, il a déjà fait bombarder trois pays, le Yémen, l’Iran et le Nigeria, sans parler des frappes mortelles dans la mer des Caraïbes, décidées au nom d’une guerre, non validée par le Congrès, contre le narcotrafic. Elles ont été accompagnées de menaces d’intervention contre le régime, indéfendable, de Nicolas Maduro au Venezuela, pour mieux rappeler que le continent américain tout entier est désormais considéré comme assujetti aux seuls intérêts des Etats-Unis.
Donald Trump revendique huit interventions décisives ayant mis fin à des conflits lancinants. On ne peut que louer l’intention affichée, certes liée à l’obsession d’un prix Nobel de la paix. Entre armistices déjà conclus et tentatives avortées, la réalité est cependant bien éloignée de cette comptabilité. Les résultats obtenus par le républicain à propos des deux guerres majeures auxquelles il a été confronté dès sa prestation de serment, celle qui oppose l’Ukraine à la Russie et celle qui a abouti à l’anéantissement de Gaza après les massacres du 7-Octobre perpétrés par le Hamas, sont ainsi très décevants. Aucune avancée n’a été enregistrée pour la première, qu’il se faisait fort de régler en vingt-quatre heures, et le cessez-le-feu obtenu à Gaza n’a débouché jusqu’à présent sur aucun début de mécanisme politique qui permettrait d’aboutir un jour à une paix juste et durable.
Dans les deux cas, Donald Trump ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Il a rompu spectaculairement en février, dans le bureau Ovale de la Maison Blanche, avec le soutien constant à Kiev de son prédécesseur, Joe Biden, sans rien obtenir en retour de Vladimir Poutine. Ce dernier peut désormais imposer sa vision d’une guerre qu’il a déclenchée sans être jamais contredit par son homologue américain.
Dans la continuité de son prédécesseur démocrate, l’alignement de Washington sur les positions extrêmes de Benyamin Nétanyahou, d’une bande de Gaza où les Palestiniens survivent à grand-peine à une Cisjordanie occupée livrée aux colons et aux militaires israéliens, est la promesse d’un pourrissement toujours plus dévastateur. Donald Trump s’est montré également incapable de peser sur les alliés des Etats-Unis, à commencer par les Emirats arabes unis, qui alimentent une guerre fratricide au Soudan, dont les horreurs ininterrompues viennent d’être rapportées dans ces colonnes.
Le président des Etats-Unis dispose de trois années supplémentaires pour dresser un bilan en accord avec ses ambitions. Cela suppose que des leçons soient tirées des décisions les plus controversées de son début de mandat. Le passage à la trappe du soft power américain, dont la brutalité a coûté des milliers de vies humaines là où Washington venait en aide aux plus démunis, le mépris affiché à l’égard de valeurs universelles, telles que les droits humains, et d’instances multilatérales déjà bien affaiblies, la hargne à l’égard des alliés historiques, Européens en tête, répondent-ils vraiment à l’impératif de « l’Amérique d’abord », ou bien font-ils en réalité le jeu des rivaux historiques de Washington, c’est-à-dire Moscou et Pékin ?