Budget 2026 : la piste d’une « année blanche », examinée par le gouvernement, critiquée de la gauche à l’extrême droite

Geler pour un an les retraites, les prestations sociales ou le barème de l’impôt sur le revenu pour réaliser des économies ? L’hypothèse, qui circule sous le nom d’« année blanche », trouve du crédit auprès de l’exécutif, mais reste décriée par les oppositions et chez Les Républicains.

Dans sa quête des 40 milliards d’économies qu’il compte trouver pour le budget 2026, le gouvernement pourrait opter, en partie du moins, pour une année blanche. C’est « une piste sur la table », a confirmé, dimanche 6 juillet, le ministre du commerce extérieur, Laurent Saint-Martin, sur France inter, qui consiste à reconduire à l’identique certaines dépenses de l’Etat, sans tenir compte de l’inflation.

Cette piste aurait le mérite, selon le ministre, de « freiner et de refroidir la dépense publique ». Ses défenseurs, à l’instar du haut-commissaire à la stratégie et au plan, Clément Beaune, louent la « simplicité », « l’automaticité », et « le rendement très important » d’une telle mesure du point de vue comptable sur les économies budgétaires.

Mais alors que les ministres de Bercy ont repris mercredi les consultations politiques sur le budget – dans un contexte de divisions à l’Assemblée nationale et après un budget 2025 qui avait mis des mois à être adopté – à la France insoumise (LFI) comme au Rassemblement national (RN), l’idée d’une année blanche est dénoncée.

« Je pense que c’est une très mauvaise solution », a déclaré le président de la commission des finances, Eric Coquerel (LFI) dimanche sur LCI. Citant une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP), M. Coquerel a souligné qu’une telle mesure rapporterait « un peu moins de 6 milliards », avec des « effets récessifs (…) surtout pour les plus défavorisés », estimant que ce serait « très mauvais » pour la consommation.

Le député de Seine-Saint-Denis prône un « gros nettoyage » dans les niches fiscales et d’augmenter les impôts des plus riches et des grandes entreprises (« taxe Zucman » sur le patrimoine et sur les multinationales, impôt sur la fortune climatique…).

Invité d’Europe 1, le vice-président délégué des Républicains, François-Xavier Bellamy, a, lui aussi, estimé dimanche qu’une « année blanche » serait « l’inverse de la bonne stratégie », invitant à « s’attaquer de très près à la dépense sociale dans notre pays, qui est devenu (…) un problème majeur », citant le revenu de solidarité active et les allocations de chômage.

Même son de cloche du côté du vice-président du RN, Sébastien Chenu, qui a fustigé dans Le Journal du dimanche « une logique de coups de rabot, d’ajustements à la marge », qui n’est, selon lui, « rien d’autre qu’un impôt déguisé », quand il faudrait « changer de logique » et « ouvrir enfin les vrais dossiers : agences d’Etat, immigration, contribution à l’Union européenne ». Mercredi, son collègue Jean-Philippe Tanguy assimilait l’idée au « néant de la politique ».

La veille, le président du Medef, Patrick Martin, s’était aussi positionné contre cette solution, estimant que ce serait « un pis-aller, parce qu’on ne pourra pas le reproduire éternellement », dans une interview diffusée sur Boursorama. Et « ça ne doit pas être l’écran de fumée [cachant] une non-décision sur les dépenses structurelles de l’Etat, des collectivités locales et des régimes sociaux », avait-il insisté.

Une épine de plus dans le pied du gouvernement qui repose sur une coalition à l’équilibre précaire et des dissensions déjà marquées au sein de la majorité : mercredi, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, estimait que la majorité ne pouvait pas « exclure d’emblée toute hausse d’impôts » pour le budget, à rebours des discours du gouvernement. Le même jour, le chef du groupe LR à l’Assemblée, Laurent Wauquiez, brandissait la menace : « Aucune augmentation d’impôt, sinon on ne vote pas le budget. »

Concernant l’année blanche, « aujourd’hui, l’arbitrage sur le principe n’est pas encore pris », selon une source au sein d’un cabinet de Bercy citée par l’Agence France-Presse (AFP). Surtout, la « fourchette » d’économies « dépendra vraiment du périmètre » choisi dans l’hypothèse où François Bayrou retiendrait l’option de l’année blanche, explique cette même source.

Car les chiffres qui circulent varient : l’Institut des politiques publiques (IPP) a estimé à la fin juin qu’une année blanche engendrerait un gain budgétaire de 5,7 milliards d’euros. Dimanche, Clément Beaune mettait, lui, en avant d’autres chiffres circulant dans la presse, « 15 à 20 milliards d’euros », ce qui représente à peu près 1 % des dépenses publiques (environ 1 670 milliards d’euros en 2024).

Mais, y compris au sein du gouvernement, la piste d’une année blanche trouve ses limites : « C’est un “one shot”, a expliqué Laurent Saint-Martin sur France inter, ça ne résout pas durablement l’équilibre de nos finances. » En 2024, le déficit public a atteint 5,8 % du PIB. Le gouvernement affiche l’objectif de le ramener sous la barre des 3 % d’ici 2029.

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