Le « jour de la libération » proclamé par Donald Trump le 2 avril est en passe de se transformer en un « jour sans fin ». Sa politique commerciale, censée infliger des droits de douane prohibitifs aux pays récalcitrants à la signature d’accords favorables aux Etats-Unis, peine à trouver une issue, entretenant une incertitude qui pèse sur l’économie mondiale.
Ses annonces tonitruantes du printemps avaient provoqué un début de panique sur le marché obligataire, le contraignant à accorder à ses partenaires commerciaux un délai de grâce de 90 jours. Alors que l’ultimatum est arrivé à échéance, mercredi 9 juillet, l’administration américaine, faute d’avoir obtenu des accords bilatéraux en nombre comme elle l’espérait, s’est résolue à fixer une nouvelle date au 1er août, assortie de menaces de droits de douane supplémentaires sur une vingtaine de pays ainsi que sur le cuivre, les produits pharmaceutiques ou les semi-conducteurs.
Si les reports successifs et les modalités changeantes entament la crédibilité de la stratégie de Donald Trump, ces flottements ne constituent pas une surprise. L’administration américaine apparaît divisée sur la marche à suivre en se heurtant à la complexité d’un processus qu’elle a sous-estimé. Après avoir promis que le président obtiendrait « 90 accords en 90 jours », seulement trois signatures ont été arrachées à ce stade : celles du Royaume-Uni, du Vietnam et de la Chine.
Mais, alors que les accords commerciaux traditionnels comptent des centaines de pages et prennent des années à négocier, Donald Trump s’est contenté avec le Royaume-Uni d’un document de quelques feuilles, comportant de nombreuses promesses qui restent à concrétiser. Avec le Vietnam, aucun texte n’a été publié et les détails de l’accord n’ont pas été divulgués. Quant à la Chine, c’est Xi Jinping qui a renversé le rapport de force à son avantage en obligeant son homologue à battre en retraite pour parvenir à une trêve très fragile.
L’Union européenne pourrait être sur le point de conclure un accord, mais les négociateurs peinent à obtenir un allégement immédiat des droits de douane ainsi qu’un engagement à ne pas introduire de nouvelles mesures. Quelles garanties offre Donald Trump que dans trois ou neuf mois, il ne va pas doubler la mise sous tel ou tel prétexte ou réclamer des concessions supplémentaires ? C’est toute la limite de son approche : en faisant voler en éclats le cadre du multilatéralisme et du droit international pour le remplacer par des méthodes d’extorsion, la parole des Etats-Unis se retrouve démonétisée.
« Les accords sont essentiellement mon accord avec eux [les pays signataires] », avoue Donald Trump, qui brandit les droits de douane au gré de ses humeurs et de ses obsessions, au-delà de toute rationalité économique. Il envisage ainsi d’appliquer des taxes de 50 % au Brésil, à qui il reproche d’avoir accusé son allié politique, l’ancien président Jair Bolsonaro, de tentative de coup d’Etat.
Le commerce international se retrouve plongé dans un maelström inquiétant. Au prix d’une nouvelle période de confusion, l’administration américaine cherche à démontrer sa fermeté tout en évitant de déclencher une nouvelle panique financière. Mais, au fur et à mesure que les annonces se succèdent de façon anarchique et que les délais s’étirent, le risque ne fait qu’être reporté. Le jour où les menaces seront mises à exécution, la réaction des marchés pourrait être aussi brutale qu’en avril. A ce stade, la Bourse mise sur le fait que « Trump always chickens out » (« Trump finit toujours par se dégonfler »). Jusqu’à quand ?