Le Monde et l’ONG Index Investigation, spécialisée en investigation numérique, ont rencontré des acteurs au cœur de la confrontation entre l’Etat et la tribu de Saint-Louis. Après une enquête de plusieurs mois, menée à la fois sur place et en métropole, les témoignages et les documents exclusifs obtenus permettent de dérouler le fil des événements ayant conduit à la mort de trois indépendantistes abattus par le GIGN.
Tout a commencé par la mobilisation contre le dégel du corps électoral, à partir de la fin de 2023, un mouvement de protestation massivement suivi par une jeunesse en marge mais politisée. Cette mesure, portée par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, à la demande du camp loyaliste, malgré l’opposition des indépendantistes, visait à ouvrir le droit de vote aux élections provinciales, un scrutin crucial, aux résidents justifiant d’au moins dix ans de résidence, au risque de faire basculer les équilibres politiques en faveur des non-indépendantistes. Explosif, alors que la question du statut du territoire n’est pas réglée et que la crise économique touche de plein fouet les plus fragiles, les Kanak en premier lieu, majoritaires dans les catégories les plus défavorisées de la population.