Kiev a subi lundi 8 juillet l’une des attaques aériennes les plus meurtrières depuis le début de l’invasion russe à grande échelle, en février 2022. La Russie a ciblé des infrastructures civiles alors que le premier ministre indien, Narendra Modi, rencontrait Vladimir Poutine à Moscou, et que le premier ministre hongrois, Viktor Orban, s’était rendu trois jours avant au Kremlin pour proposer un « cessez-le-feu » en Ukraine.
Le plus grand hôpital pédiatrique du pays, Okhmatdit (mot-valise pour « protection de la mère et de l’enfant »), et une maternité privée de Kiev ont été frappés par des missiles, qui ont causé la mort de 27 personnes, dont plusieurs enfants. Un bilan provisoire, car des corps peuvent encore se trouver sous les décombres.
Une heure après qu’un missile russe a détruit le bâtiment à deux étages abritant l’unité de soins intensifs et d’hémodialyse d’Okhmatdit, une foule de sauveteurs, de personnel hospitalier et de militaires venus en camion remplissent la cour de l’hôpital, où l’air chargé de poussière est difficilement respirable. Les uns s’affairent à dégager les victimes coincées sous les décombres, les autres à balayer les débris de verre et une grande quantité de meubles détruits. Des volontaires affluent toute la matinée, apportant de l’eau et des vivres aux familles et aux enfants malades.
Vers 13 heures, une seconde alerte aérienne interrompt le travail. Près de l’entrée de l’hôpital, des voix crient : « Un drone russe survole Kiev » et invitent tout le monde à se mettre aux abris. La peur d’une seconde frappe visant les sauveteurs, une tactique plusieurs fois utilisée par la Russie ces derniers mois, provoque une dispersion rapide dans le calme.
Au sous-sol des urgences pédiatriques, quelques dizaines de familles se sont réfugiées en attendant la fin de l’alerte. Veillant sur son fils Oreste, un nourrisson prématuré de 2 mois et demi dormant dans une couveuse, Olga Melnyk, 34 ans, raconte qu’elle a vu une docteure blessée aux jambes par des éclats de verre. « C’était affreux. Je ne comprends pas comment une chose pareille peut se produire. »
Elle se souvient que l’explosion est survenue une dizaine de minutes après que l’alerte a sonné dans l’hôpital. Comme les autres patients et le personnel, elle s’était alors réfugiée dans le couloir : « J’ai d’abord entendu des explosions lointaines, puis celle qui a touché l’hôpital. C’était si puissant que les murs ont tremblé. J’ai pleuré sans pouvoir me contrôler. »
Plus loin dans le couloir sombre, Natalia Koval, 24 ans, tient dans ses bras son fils Nazar, 3 ans et demi, qui vient d’être opéré des végétations. Il est pâle, apeuré et se met à pleurer. « Quand l’alerte a été donnée, nous sommes sortis dans le couloir du 5e étage avec les autres patients. L’explosion a été si forte que j’ai vu des objets voler. Des gens sont tombés. Mon fils était terrorisé. » Natalia se met à pleurer et implore : « Je n’ai qu’une seule envie : rentrer chez moi. » Son mari lui prend la main pour la calmer, et dit, serrant les dents : « Les Russes ont fait exprès de tirer sur un hôpital pour enfants. »