Élections américaines 2024 : Marjorie Taylor Greene, la plus zélée des trumpistes

Peut-on être encore plus clivant que Donald Trump sur la scène politique américaine ? Aussi étonnant que cela puisse paraître, la réponse est sans doute… oui.

Depuis sa première victoire au Congrès en 2020, qu’elle a remportée en surfant sur la vague trumpiste, Marjorie Taylor Green, 50 ans, coach sportive venue tardivement à la politique, ne rate aucune provocation. Avec méthode, la représentante s’applique à ne laisser passer aucune controverse sans mettre de l’huile sur le feu. Et ça marche : en 2022, elle a été réélue triomphalement dans sa circonscription du nord-ouest de la Géorgie, à la frontière de l’Alabama et du Tennessee, et fait encore figure de favorite pour le scrutin de novembre.

Dans ce Sud profond solidement républicain, tous les candidats en lice sous cette étiquette s’imposent aisément, avec autour de 75 % des voix, quelle que soit la tendance qu’ils incarnent – plus modérée, comme Mitt Romney, adversaire de Barack Obama en 2012 ; plus radicale, comme Donald Trump, en 2016 et 2020.

Mais Marjorie Taylor Green bouscule les lignes. Non pas parce qu’elle aime poser avec un fusil d’assaut – c’est désormais presque un classique pour les postulants républicains dans cette Amérique rurale. Mais parce qu’elle affiche un complotisme décomplexé, qu’elle reprend à son compte la propagande de Moscou et qu’elle n’hésite pas à accuser une adversaire politique de « trahison », un crime « passible de la mort »…

Il aura fallu à Marjorie Taylor Green très peu de temps pour se faire un nom. Quand elle se lance en politique, c’est une inconnue. Mais Brian Robinson, stratège républicain à Atlanta, comprend très vite qu’il a affaire à un phénomène. Il conseille alors John Cowan, un neurochirurgien qui brigue également le siège de député laissé vacant par le républicain sortant. « On a tout de suite su que c’était une adversaire très douée pour faire campagne, dit-il. Dès le premier débat, virtuel, on était en pleine pandémie, j’ai vu sa capacité à dire tout et n’importe quoi, son aplomb incroyable. Comme Donald Trump. »

Avant 2016, Marjorie Taylor Greene ne se souciait pas de politique. « Elle avait même déclaré n’avoir jamais voté », précise Brian Robinson. Ce qui ne l’empêche pas de remporter facilement la primaire républicaine de 2020. Dans sa circonscription rurale de Géorgie, on aime les personnalités au verbe haut et fort. « Elle n’a peur ni de rien, ni de personne, et ça, ça plaît ici », lâche Matthew Nave, un jeune républicain qui a travaillé avec elle, aujourd’hui responsable local de la campagne de Donald Trump.

Au Congrès, elle s’impose rapidement comme la plus zélée des trumpistes. Par la voix, par ses tenues, qui sont l’occasion de faire passer un message : un masque anti-Covid sur lequel est écrit « Trump a gagné », une casquette « Make America Great Again » (« Maga ») lors d’un discours de Joe Biden devant le Congrès… Toujours en quête d’attention, elle rompt avec le protocole, crie dans l’hémicycle, lance des propos incendiaires.

Des excès qui ne tardent pas à heurter ses collègues. « Trop, c’est trop… », disent-ils. En 2021, elle est privée de certaines de ses prérogatives au Congrès. Mais peu importe. Cheffe de file de la droite dite « Maga », elle devient une figure reconnue. C’est le mécanisme de la politique moderne : des polémiques sur les réseaux sociaux, donc de la visibilité, donc des invitations sur Fox News ou sur les antennes des médias de l’univers Maga, donc des collectes de fonds records, donc une influence croissante, etc.

À Dalton, on imagine déjà la députée promise à de plus importantes fonctions en cas de victoire de Donald Trump le 5 novembre. Un ministère ? Une ambassade ? « À moins que le président n’ait besoin d’elle pour continuer à donner de la voix au Congrès », note Matthew Nave. Donner de la voix, Marjorie Taylor Greene sait faire.

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