Législatives 2024 : à Vanxains, le Fraternibus du Secours catholique mise sur le lien social

À Vanxains, tous les toits sont neufs. En juin 2022, de violents orages de grêle se sont abattus sur la commune périgourdine, marquant durablement ses constructions et, surtout, l’esprit de ses 704 habitants. Françoise, 80 ans (« et demi », précise-t-elle), en parle comme de « la terrible catastrophe ». Attablée, ce mercredi 10 juillet, devant le Fraternibus du Secours catholique installé pour la matinée devant la mairie, elle confie son traumatisme, sans jamais se départir de son sourire. « Maintenant quand on entend qu’il va y avoir un orage, on tremble », surenchérit Andrée.

C’est à la suite de cette catastrophe naturelle que le Secours catholique a renforcé son action dans la commune. Déjà présent depuis l’hiver 2020, « avec masques et distanciation sociale », rappelle Philippe Beaumont, la venue du Fraternibus s’est faite dès lors plus régulière, devenant bimensuelle pour répondre à une « demande de lien et d’échange », note le bénévole du Secours catholique. Ainsi Françoise ne manque-t-elle jamais une occasion de retrouver Jocelyne, Angèle, Andrée et « M. Texier, pas là aujourd’hui », autour de la tasse de café et des chouquettes offertes par Philippe et Nadine, qui viennent à eux un mercredi sur deux.

La pluie qui s’est invitée sur la place de la mairie ce 10 juillet n’y change rien. Sous la tonnelle du Fraternibus, la joyeuse équipe discute à bâtons rompus. Des arrière-petites-filles d’Angèle tout juste nées, de « la terrible catastrophe » de 2022, des problèmes de mobilité qui se posent dans la commune et du désert médical avec lequel il faut composer. Des élections d’il y a trois jours, on parle peu. « Ces dernières semaines bien sûr il est arrivé que le fait politique s’invite à la table, pour parler inquiétudes et intérêts de chacun, précise Philippe Beaumont. Mais pour que la discussion reste apaisée, on évite d’imposer ce thème-là, sans l’exclure s’il s’impose. »

« On a élu qui ici ? », s’enquiert tout de même Françoise. « Le Rassemblement national ! », réagit Jocelyne en cessant une seconde son ouvrage au crochet. À 75 voix près sur les 45 103 exprimées, c’est Florence Joubert qui a remporté la 3e circonscription de Dordogne face au candidat Nouveau Front populaire ce 7 juillet. Une première. En 2022, c’est un député de la majorité présidentielle qui s’était imposé, devant la Nupes. « Je ne veux pas politiser cette conversation, mais je dois admettre que j’ai eu peur que le RN obtienne une majorité à l’Assemblée, reconnaît Jocelyne. Des émeutes que ça aurait pu entraîner, surtout. »

Pour Jean Chalié, délégué de l’antenne locale du Secours catholique, « ces discussions sont cathartiques. On vient discuter de ses problèmes dans la bonne humeur, le bus n’est qu’un prétexte fédérateur. » En accueillant la parole, « sans discrimination, sans culpabilisation, sans autre ambition que de proposer un temps de discussion », souligne Philippe Beaumont, les bénévoles parviennent à créer des connexions entre les habitants.

Parfois, ils se font médiateurs et se rapprochent des municipalités pour pallier les manques constatés à force de discuter. Entre les quatre tours du quartier fragilisé de Mondoux, à Périgueux, où le Fraternibus s’installe un lundi sur deux, la possibilité de créer un city-stade où les jeunes puissent jouer au foot est ainsi à l’étude. « C’est un travail de colibri », note Jean Chalié.

Il est midi, le bus doit plier bagage. Mais personne ne tient à couper court à la conversation, qui se poursuivra donc dans le jardin de Françoise. Impossible de refuser : son époux Charles a déjà mis la table et sorti le pinot local, échangé à la voisine contre un sac de pommes de terre. On trinquera donc, en ces temps de fracture politique, à la santé du lien social.

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