Cette technique n’avait jusque-là pas de cadre légal en France. Lors d’une visite matinale au pôle dévolu aux affaires non élucidées, au tribunal judiciaire de Nanterre, le garde des sceaux a déclaré lundi 20 octobre, qu’il proposerait l’autorisation de la généalogie génétique par les magistrats, dans le cadre d’une loi en janvier.
« Aujourd’hui, il y a une trentaine d’affaires au pôle “cold case” qui trouveraient une réponse si nous acceptons la généalogie génétique », a déclaré Gérald Darmanin à la presse en fin de matinée.
Cette technique permet de comparer la trace génétique inconnue avec les bases de données américaines, qui comprennent notamment des millions d’ADN cédés volontairement à des sites qui proposent des tests récréatifs, illégaux en France, à des personnes curieuses de leurs origines.
Le garde des sceaux a par ailleurs rappelé que « plus de 50 000 traces au Fnaeg [fichier national automatisé des empreintes génétiques] (...) ne trouvent pas d’auteur parce que nous ne connaissons pas les ADN des personnes ». M. Darmanin a également évoqué une potentielle « extension » du Fnaeg, estimant que « chaque pays devrait avoir une base souveraine de constitution génétique ».
L’utilisation de la généalogie génétique sera « strictement encadrée par la loi », a précisé le ministère dans un communiqué plus tôt dans la journée, « réservée aux crimes les plus graves (meurtres, viols, enlèvements) et décidée sous le contrôle du juge ».
A la fin de 2022, Bruno L., surnommé le « prédateur des bois » pour avoir enlevé, emmené dans la forêt et violé cinq adolescentes entre 1998 et 2008, a été arrêté grâce à cette technique avec l’appui du FBI, une première en France.
Les membres du pôle sont « très, très heureux » de cette proposition qui permettrait de « sécuriser juridiquement » les innovations des magistrats dans « des dossiers qui sont anciens », a déclaré la magistrate Sabine Khéris, à la tête du pôle « cold cases », lors d’une table ronde avec le ministre. « Ces avancées-là sont importantes pour nous mais aussi pour les demandes formulées par les victimes, les proches, les avocats », a rappelé Yves Badorc, procureur de la République de Nanterre.
« Il faut aller plus loin, nous n’avons pas le droit au surplace, nous n’avons pas le droit de décevoir », a exhorté le président du tribunal, rappelant que la plus ancienne affaire dont est saisi le pôle date d’il y a cinquante-trois ans.
Contacté par l’Agence France-Presse (AFP), Me Didier Seban, avocat spécialiste des « cold cases » dont le cabinet est lié à la création du pôle, a estimé que cette annonce gouvernementale était « une avancée », mais a aussi souhaité « qu’on n’enferme pas ce dispositif dans des conditions qui le rendraient inutilisable ». « On est content de ces annonces mais attentifs », a-t-il résumé.