Au même titre que les anachronismes ou les clins d’œil à l’actualité, les stéréotypes composent le substrat comique des aventures d’Astérix. Les Corses ne résistent pas à l’appel de la sieste, les Helvètes sont obsédés par la propreté, les Anglais gardent leur flegme en toutes circonstances, les Hispaniques affectent une fierté à fleur de peau…
Dans Astérix en Lusitanie, quarante et unième volume de la série, qui sort ce jeudi 23 octobre dans dix-neuf langues et dialectes en tirage XXL (cinq millions d’exemplaires dans le monde, dont deux millions en France), Fabcaro et Didier Conrad – les actuels repreneurs du personnage créé par René Goscinny (1926-1977) et Albert Uderzo (1927-2020) – labourent avec entrain le terrain des particularismes.
Rien n’a été oublié dans cette histoire se déroulant dans l’actuelle Lisbonne : ni la saudade chère aux Portugais, ni la façon dont ils déclinent la morue à toutes les sauces, ni leur art de la faïence ou de la construction, et encore moins quelques figures historiques incontournables comme Amalia Rodrigues ou Fernando Pessoa. Le cliché va bon train, dans la tradition des récits de « voyage » qui ponctuent la collection depuis ses origines (Astérix et les Goths, Astérix et Cléopâtre, Astérix chez les Bretons, Astérix et les Normands, Astérix en Hispanie…).
Déceler autre chose que de l’humour dans ce catalogue d’idées reçues sur les cultures étrangères est une fausse piste. Comme le développe Nicolas Rouvière, maître de conférences à l’université Grenoble-Alpes, auteur de plusieurs ouvrages de référence sur le Gaulois à moustaches (Astérix ou les Lumières de la civilisation, Le Monde/PUF, 2006 ; Astérix ou la Parodie des identités, Champs, 2008 ; Le Complexe d’Obélix, PUF, 2014), la caricature est tellement poussée dans Astérix qu’elle en devient artificielle, à la manière d’un running gag, vidée de toute xénophobie.