Lors des discussions sur la réforme des retraites, plusieurs députés ont affirmé que la plus grave menace planant sur le système de répartition était la baisse de la natalité. Bientôt on compterait plus de pensionnés et moins de cotisants, sur lesquels pèserait alors une charge croissante. Bientôt… en fait dans plus de vingt ans ! Le temps que le faible effectif des bébés d’aujourd’hui accède au marché de l’emploi. Les députés les plus libéraux ont alors réveillé le serpent de mer de la retraite par capitalisation. Dans ce cas, le rapport entre le nombre d’actifs et de retraités ne joue aucun rôle. Seul compte le rendement des fonds de retraite auxquels cotisent les actifs.
La retraite par capitalisation n’est cependant pas neutre par rapport à la natalité, elle est en rivalité avec elle. Elever un enfant mobilise des ressources financières importantes qui pourraient être placées en vue de la retraite. Les travaux d’Antoine Math à l’Institut de recherches économiques et sociales chiffrent cette dépense à environ 650 euros par mois, une fois défalquées les aides de l’Etat. De sa naissance à l’âge de 20 ans, l’enfant coûtera en moyenne 156 000 euros à ses parents. Le chiffrage est identique dans les pays voisins.
Si ces sommes étaient placées dans un fonds de pension, elles pourraient accroître la retraite future. L’Homo economicus, individualiste de l’économie libérale, n’a donc pas intérêt à engendrer des descendants. Cette conclusion met en lumière une opposition radicale, face à la natalité, entre régime de capitalisation et régime de répartition.
Dans le second, les cotisations des actifs servent directement aux pensions des retraités. Or, on peut calculer que 81 % de ces actifs sont les enfants des retraités. La génération des enfants finance en grande partie les pensions des retraités qui sont leurs parents. Quant au retraité sans enfants, il dépend des cotisations des enfants d’autres retraités. Il est ce que les économistes nomment un « passager clandestin ». En lisant ces lignes, il s’insurgera, arguant que sa pension est la contrepartie des cotisations qu’il a versées durant toute sa vie active.