C’est une nouvelle étape majeure du rebond du nucléaire aux Etats-Unis. Le gouvernement américain va investir au moins 80 milliards de dollars (un peu plus de 68 milliards d’euros) dans la construction de nouveaux réacteurs nucléaires conventionnels en vertu d’un partenariat annoncé, mardi 28 octobre, avec le groupe américain Westinghouse Electric Company.

L’accord constitue le prolongement d’un décret pris à la fin de mai par Donald Trump et intitulé « redynamiser le parc nucléaire industriel », dans lequel le président américain fixait l’objectif de dix réacteurs conventionnels en chantier d’ici à 2030. Cet essor est, en partie, porté par les géants du secteur technologique aux besoins croissants en électricité pour alimenter leurs centres de données (data centers), notamment pour l’intelligence artificielle (IA).

« Ce partenariat incarne la vision du président Trump, à savoir retrouver notre souveraineté énergétique, créer des emplois bien rémunérés et placer les Etats-Unis aux avant-postes de la renaissance du nucléaire », a déclaré le ministre du commerce, Howard Lutnick, cité dans le communiqué.

Les Etats-Unis n’ont plus mis en chantier de nouvelle centrale nucléaire depuis 2009 et avaient, durant plus d’une décennie, délaissé cette source d’énergie, du fait notamment de son image dégradée auprès du grand public. Cette impopularité était notamment due à une série d’accidents, à Three Mile Island (1979), Tchernobyl (1986) et Fukushima (2011). Le nucléaire avait aussi la réputation d’être propice aux dérapages sur le plan financier et du calendrier de réalisation. Les deux derniers réacteurs mis en service aux Etats-Unis ont ainsi coûté plus de 30 milliards de dollars, soit plus du double des 14 milliards projetés au départ.

Mais l’invasion de l’Ukraine par la Russie a entraîné un bouleversement des équilibres du marché de l’énergie, qui a incité les Etats à diversifier leurs approvisionnements. A cela s’est ajoutée l’accélération de la consommation d’électricité aux Etats-Unis sous l’effet de la montée en puissance des centres de données avec la révolution de l’informatique à distance (cloud) et de l’IA.

A la fin de juin, la gouverneure de l’Etat de New York, Kathy Hochul, a annoncé avoir lancé le projet d’une nouvelle centrale, quatre ans seulement après la fermeture du site d’Indian Point, jugée trop proche de New York.

Depuis le grave incident du site de Three Mile Island (Pennsylvanie), qui a failli provoquer, en mars 1979, la rupture de la cuve d’un réacteur et la contamination radioactive de toute une région, un seul permis a été délivré aux Etats-Unis. Il concernait les unités 3 et 4 du site Vogtle, situé près de Waynesboro (Géorgie). L’unité 3 a été mise en service en juillet 2023 et l’unité 4 en avril 2024.

Westinghouse Electric Company est une émanation de l’énergéticien historique Westinghouse Electric Corporation, fondée en 1886 à Pittsburgh (Nord-Est). L’entreprise a déposé le bilan en 2017 avant d’être rachetée en 2018 par la société d’investissement Brookfield Corporation, qui en est l’actionnaire majoritaire, tandis que le géant canadien de l’uranium Cameco possède une participation minoritaire.

L’accord passé entre le gouvernement américain et Westinghouse inclut un mécanisme de partage des bénéfices entre les partenaires privés et l’Etat. Selon un porte-parole de Brookfield, une fois construites, les centrales ne devraient pas être propriété de l’Etat mais de promoteurs ou de compagnies d’électricité. « Il n’y a pas encore d’information sur les sites potentiels [d’installation des réacteurs] à ce stade », a-t-il également fait savoir.

Westinghouse propose deux modèles, les AP1000 et AP300, des réacteurs à eau pressurisée de puissances respectives d’un peu plus d’un gigawatt (GW) et de 300 mégawatts (MW). L’AP300 est un petit réacteur de nouvelle génération, dit SMR (small modular reactor). Si l’AP1000 a déjà été validé par le régulateur américain, la NRC, et plusieurs de ses exemplaires mis en service, notamment les deux unités de Vogtle, ce n’est pas le cas de l’AP300, encore en cours d’homologation.

Outre les nouveaux réacteurs, les nouveaux besoins en électricité ont incité opérateurs et groupes technologiques à relancer des centrales existantes. Google a dévoilé lundi un accord avec l’énergéticien américain NextEra Energy qui débouchera sur la remise en service, début 2029, de la centrale nucléaire Duane Arnold, dans l’Iowa. C’est le troisième projet de réouverture de centrale dévoilé récemment, après ceux concernant les sites de Palisades (Michigan) en 2023 et Three Mile Island (Pennsylvanie) en 2024.

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