Dans sa course autour du Soleil, la Terre entre en collision avec des poussières interplanétaires et celles-ci donnent naissance à des « étoiles filantes » plus ou moins éclatantes et longues en se désintégrant dans la haute atmosphère. De dimensions microscopiques à centimétriques ces poussières proviennent pour l’essentiel des noyaux cométaires qui viennent virer autour du Soleil. Une fraction de leur croûte glacée est sublimée à l’approche du foyer solaire, ce qui libère de grandes quantités de gaz et de poussières qui gainent irrégulièrement l’orbite de ces astres vagabonds. Si l’on peut voir quelques étoiles filantes chaque nuit, leur nombre augmente considérablement lorsque la Terre frôle ou traverse l’une de ces traînes de poussières cométaires et les astronomes parlent alors d’un essaim. Les belles étoiles filantes qui zèbrent les nuits de la mi-août proviennent de l’essaim des Perséides, mais d’autres essaims spectaculaires sont observables au fil des mois : en novembre, il est ainsi possible de guetter les étoiles filantes de l’essaim des Taurides et celles de l’essaim des Léonides.
Comme son nom le révèle, l’essaim des Taurides permet de voir des étoiles filantes qui semblent rayonner autour de la constellation du Taureau. Cela commence généralement vers le 5 novembre, plutôt au sud de cette grande figure céleste, non loin de l’amas stellaire des Hyades, et se poursuit vers le 12 novembre plutôt au nord, vers l’amas des Pléiades. Cet automne, la Pleine Lune se produisant en début novembre dans le Bélier – constellation limitrophe du Taureau – son éclat éblouissant nous empêchera de voir les étoiles filantes les moins brillantes de la première période, mais l’observation des Taurides du nord ne devrait pas être perturbée car la Lune se sera alors déjà bien éloignée de cette région de la voûte céleste.
Les astronomes ont déterminé que les poussières de l’essaim des Taurides ont été relâchées par la comète périodique 2P Encke qui revient toutes les 3,3 années à proximité du Soleil. Leur collision avec la haute atmosphère terrestre se produit à un peu moins de 30 km/s et leur éclat est parfois intense. Quelques étoiles filantes au moins aussi brillantes que la planète Vénus engendrées par la désintégration d’objets plus gros que de simples poussières sont observées chaque année et, selon un article publié récemment dans la revue scientifique Acta Astronautica, l’essaim des Taurides pourrait héberger des corps encore plus massifs capables de provoquer des événements météoritiques d’une ampleur comparable à celui de Tcheliabinsk (15 février 2013) ou à celui de la Toungouska (30 juin 1908). D’ailleurs, pour certains chercheurs, le corps qui s’est vaporisé au-dessus de la Toungouska en 1908 appartenait à l’essaim des Bêta Taurides qui se manifeste en juin lorsque la Terre frôle à nouveau l’orbite de la comète 2P Encke.
Un peu plus tard dans le mois, durant la nuit du lundi 17 au mardi 18 novembre, les étoiles filantes de l’essaim des Léonides entoureront la constellation du Lion. Le radiant, c’est-à-dire le point autour duquel semblent rayonner ces flèches lumineuses, se situe près de la tête du félin, non loin de Régulus. Les Léonides sont généralement très rapides – ces poussières interplanétaires heurtent l’atmosphère terrestre à plus de 70 km/s ! – courtes et peu éclatantes. Si vous vous éloignez de la pollution lumineuse des régions urbaines, vous avez de bonnes chances de compter plusieurs dizaines de Léonides en quelques heures, mais il vous faudra résister au froid et à l’humidité. Les poussières avec lesquelles la Terre entre alors en collision ont été dispersées sur son orbite par la comète périodique 55P Tempel-Tuttle qui passe au plus près du Soleil tous les trente-trois ans. De splendides « pluies » de centaines d’étoiles filantes extrêmement longues et lumineuses ont été observées durant plusieurs années après son passage de 1998 et nous pourrions donc de nouveau assister à de tels spectacles après le retour de cette comète en 2031 !
Si la météo automnale, souvent capricieuse, vous offre quelques belles nuits aux bons moments, je vous invite à vous éloigner des villes et des sources de lumières artificielles pour bénéficier du ciel le plus sombre possible et saisir au vol un maximum de ces flèches célestes. Une chaise longue et une grosse couverture sont les meilleurs « instruments » pour observer les étoiles filantes, ce que vous ferez préférentiellement à l’œil nu car le champ des jumelles ou des télescopes est bien trop réduit pour rendre justice à ce spectacle fulgurant.
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Chaque mois, je vous propose de découvrir mes images du ciel dans La Lettre du Guide du Ciel.
Phases de la Lune en novembre
La Lune est pleine le 5 dans le Bélier, au dernier quartier le 12 dans le Lion, nouvelle le 20 dans la Balance et au premier quartier le 28 dans le Verseau.
Quelques rendez-vous sous le ciel de novembre
Jupiter et la Lune passent la nuit du dimanche 9 au lundi 10 novembre dans les Gémeaux. Ils se lèvent un peu plus de quatre heures après le coucher du Soleil et traversent une large portion de la voûte céleste jusqu’à l’aube. Ils brillent alors à plus de soixante degrés de hauteur au-dessus de l’horizon sud et leur écart apparent est proche de quatre degrés. La Lune est de plus en plus ronde lors de sa rencontre mensuelle avec Jupiter, ce qui nous indique, s’il en était besoin, que l’opposition approche pour cette planète. Pour une planète externe, c’est-à-dire une planète qui tourne autour du Soleil sur une orbite plus grande que celle de la Terre, l’opposition est le moment où le Soleil, la Terre et elle sont alignés dans l’espace. C’est aussi lors de sa période d’opposition que la distance qui nous sépare d’elle est la plus petite. Nous sommes actuellement à 706 millions de kilomètres de Jupiter, soit 4,7 unités astronomiques (ua) ou 39 minutes à la vitesse de la lumière, et pour son opposition, le 10 janvier 2026, nous serons à 633 millions de kilomètres – 4,2 ua ou 35 minutes-lumière.
Comme tous les astres, la Lune se lève à l’est et se couche à l’ouest, puisque le mouvement apparent des astres est la conséquence de la rotation de notre planète sur elle-même d’ouest en est. Mais la Lune a la particularité de tourner autour de la Terre à une distance relativement petite aux échelles astronomiques et son mouvement propre contrarie son déplacement apparent quotidien puisqu’elle glisse vers l’est de près d’un demi-degré par heure, soit une valeur comparable à son diamètre sur le ciel. En une journée, notre satellite se déplace donc d’une douzaine de degrés vers l’est par rapport aux étoiles et je vous invite à vérifier cette valeur en observant sa proximité avec deux étoiles très brillantes : Régulus du Lion et Spica de la Vierge. Le jeudi 13 novembre à l’aube, une heure et demie avant le lever du Soleil, le gros croissant lunaire brille à trois degrés à l’est de Régulus et, le lundi 17 novembre au même instant, le vieux croissant est visible à moins de deux degrés à l’ouest de Spica. La séparation angulaire entre ces deux étoiles étant de cinquante-quatre degrés, si nous enlevons les trois degrés du 13 et les deux degrés du 17 nous obtenons un déplacement proche de quarante-neuf degrés en quatre jours pour la Lune, soit un peu plus de douze degrés par jour.
Nous allons très prochainement perdre Vénus dans le ciel de l’aube. Son élongation solaire diminue régulièrement et, le mardi 18 novembre à l’aube, elle n’est plus qu’à douze degrés de l’astre du jour. Cela signifie qu’elle se lève à peine plus d’une heure avant lui. L’éclat de cette planète étant très fort (magnitude - 3,9), elle reste facile à repérer à l’œil nu au ras de l’horizon est-sud-est durant le crépuscule nautique si l’atmosphère est limpide sur votre site d’observation. Même s’il est à plus de dix degrés de Vénus, l’arc de la vieille Lune est splendide et la portion nocturne du globe de Séléné est délicatement surlignée par la lumière cendrée. Ce n’est assurément pas la conjonction la plus serrée de l’année, mais l’ambiance matinale devrait être magnifique, aussi bien en ville qu’en pleine nature. Il s’agit en outre de la dernière rencontre visible avant plusieurs mois pour ces deux astres car Vénus sera trop proche du Soleil en décembre et en janvier et nous devrons attendre jusqu’au 18 février 2026 pour les admirer côte à côte de nouveau. Entretemps, Vénus sera passée en conjonction avec le Soleil au tout début du mois de janvier.
Le samedi 29 novembre au soir, deux heures après le coucher du Soleil, la Lune gibbeuse croissante et Saturne sont pratiquement au méridien, à plus de quarante degrés de hauteur. Leur séparation apparente est proche de trois degrés – un peu plus que la largeur du pouce bras tendu – et l’éclat de la planète a baissé sensiblement depuis le début du mois. Les anneaux sont toujours pratiquement invisibles dans les petits instruments car leur inclinaison est inférieure à un demi-degré, mais si vous avez la possibilité de les observer dans un télescope de grand diamètre, leur finesse vous ravira et vous pourrez peut-être, si vous choisissez bien votre nuit, contempler le passage de l’ombre de Titan, la plus grosse lune de Saturne, sur l’atmosphère de cette planète géante.
Le ciel en novembre
Aux latitudes européennes, le problème récurrent du mois de novembre est le mauvais temps ; les nuits ou les fractions de nuit durant lesquelles l’observation de la voûte céleste est possible se comptent souvent sur les doigts d’une seule main. Alors si une courte période anticyclonique se présente, lâchez tout et allez admirer le ciel étoilé loin des lumières. L’horizon sud est garni par des constellations assez peu spectaculaires à l’œil nu, Capricorne, Verseau, Poisson austral, Sculpteur, Baleine, mais l’étage supérieur est bien plus attrayant. Le carré de Pégase arrive au méridien en début de soirée et il tire derrière lui tout un aréopage de figures importantes, riches d’étoiles brillantes et d’objets célestes particulièrement attractifs à l’œil nu, aux jumelles et dans les instruments de plus grand diamètre. Il y a bien évidemment Andromède et sa galaxie majestueuse, qui a la même apparence à l’œil nu qu’une petite louche de Voie lactée. Non loin d’elle, la figure du Triangle abrite, elle aussi, une galaxie éponyme, mais elle est bien plus délicate à détecter sans instrument. Cassiopée, Persée et le Cocher sont de superbes ensembles étoilés qui se succèdent en descendant le mince filet de la Voie lactée ; celle-ci gagne un peu d’épaisseur à l’approche d’Orion et du Petit Chien. Tard dans la nuit, les Gémeaux et le Lion encadrent le Cancer au-dessus de l’horizon est, puis ils s’élèvent à la poursuite d’Orion. Juste avant l’aube, la Grande Ourse reprend du poil de la bête après son rase-mottes septentrional. Cette année, Saturne nous accompagne dès la fin du crépuscule et elle est rejointe par Jupiter en cours de soirée.
Carte du ciel visible en novembre 2025 vers la fin du crépuscule à la latitude de la France métropolitaine. Les cartes de ce billet peuvent être utilisées en Europe et dans le monde à l’intérieur d’une bande s’étendant de 38° à 52° de latitude nord. Si vous êtes à plus de 45° nord, l’étoile Polaire sera plus haute dans votre ciel et, le soir, Fomalhaut du Poisson austral sera d’autant plus proche de l’horizon sud. Si vous êtes à moins de 45° nord, l’étoile Polaire sera plus proche de l’horizon nord et Fomalhaut sera plus éloignée de l’horizon sud.
Cette carte montre le ciel visible en novembre 2025 à l’orée de l’aube à la latitude de la France métropolitaine. Attention, les cartes du ciel ne sont pas à l’envers ! Elles représentent simplement les astres qui sont situés au-dessus de nos têtes. Si vous vous allongiez avec la tête vers le nord et les pieds vers le sud, l’est serait bien à votre gauche et l’ouest à votre droite. Utilisez ces cartes en les imprimant et en les faisant tourner de telle sorte que le nom de la direction dans laquelle vous observez soit écrit à l’endroit. Les constellations et les étoiles que vous retrouverez dans la portion du ciel qui vous fait face sont toutes celles dont le nom est lisible sans trop pencher la tête. Les noms des constellations et de leurs principales étoiles sont indiqués, ainsi que le tracé des constellations les plus importantes ; ce tracé est parfois incomplet lorsque la figure est en partie cachée sous l’horizon. Le ciel est très vaste et les constellations qui semblent petites sur les cartes sont, en fait, très grandes : votre main ouverte et bras tendu cache ainsi à peine l’ensemble du Chariot de la Grande Ourse.
L’édition 2026 de mon ouvrage annuel sur l’observation du ciel à l’œil nu est disponible dans votre librairie habituelle. Le texte passe en revue, de janvier à décembre, les plus beaux phénomènes astronomiques visibles sans instrument (conjonctions, éclipses, lumière zodiacale, Voie lactée) et les agrémente de conseils pratiques, de rappels mythologiques sur les constellations, d’informations encyclopédiques sur les planètes et les étoiles et d’idées pour observer facilement le ciel en ville ou en pleine nature. Avec plus de 140 images, cartes et schémas photographiques.