« Février 2021, Malaga (Andalousie). Tout dans notre maison me fait horreur. C’est un fouillis permanent. Mon mari a pris l’habitude de laisser derrière lui des tiroirs béants, des vêtements suspendus aux poignées de porte, des livres empilés au hasard. La seule pièce vraiment rangée, c’est son bureau, un espace où il siège, entouré de ses ordinateurs et de ses imprimantes. Promoteur immobilier, il développe depuis six mois des projets dans la région, dont nous sommes tous les deux originaires. C’est ici, après toute une vie passée à Paris, qu’il a choisi de terminer sa carrière. Moi, je l’ai suivi.
J’ai 46 ans, je suis femme au foyer. Moi qui aurais tant aimé être psychologue, je n’ai pas eu le courage de reprendre mes études après la naissance de ma fille unique, en 1995. J’ai été secrétaire dans une agence de voyages près de la gare Saint-Lazare, à Paris, j’ai ouvert un restaurant-traiteur de spécialités espagnoles dans le 11e arrondissement de la capitale… Mais le rythme éprouvant a fini par avoir raison de moi et, au bout de six ans, j’ai arrêté. Aujourd’hui, les années ont passé et j’ai l’impression de ne plus savoir rien faire. Même Internet, c’est compliqué.
Cela fait quelques semaines que je soupçonne mon mari de mener une double vie. Un matin, en allant faire des courses au supermarché, je trouve dans le coffre de sa voiture une corbeille à papier remplie de boîtes de comprimés contre les troubles de l’érection. Je le confronte dès mon retour. Il rejette tout en bloc, sans la moindre hésitation, et retourne la situation contre moi, en me traitant de folle.