Comme il fut difficile de se quitter, comme il fut difficile de ne plus être là tous ensemble rassemblés autour d’une même cause, la lutte contre les ravages assassins du trafic de drogue, et autour de l’homme qui l’incarne aujourd’hui à Marseille : Amine Kessaci.
Avec sa mère et ses sœurs, le jeune militant écologiste, 22 ans à peine, avait appelé au nom de son association Conscience qui vient en aide aux victimes du narcobanditisme, à se rassembler samedi 22 novembre devant le rond-point Claudie d’Arcy, dans le quatrième arrondissement de la cité phocéenne. C’est là où son jeune frère Mehdi a été assassiné quelques jours plus tôt. Tué de six balles dans le thorax, lui, si jeune, 20 ans, étudiant en BTS banque qui s’apprêtait à repasser le concours de gardien de la paix. Tué « parce qu’il était mon frère », ne cesse de rappeler dans un cri de douleur Amine Kessaci. Tué pour intimider. Tué pour faire peur.
Samedi, près de 6 200 personnes, selon la préfecture des Bouches-du-Rhône, ont justement bravé cette peur pour dire à Amine et à sa famille qu’ils n’étaient pas seuls. Et, oui, beaucoup se sont attardés après la fin de la cérémonie pour se dire un mot, se serrer dans les bras, pleurer ensemble et surtout déposer un bouquet de fleurs à l’endroit même où Mehdi a été abattu. Ce recueillement partagé est une première. Jamais Marseille ne s’était autant mobilisée pour dénoncer le narcotrafic.
La foule est dense, transgénérationnelle mais pas aussi mixte que certains l’espéraient. Kamel, le pseudo qu’il s’est choisi, est venu accompagné de deux amis originaires, comme la famille Kessaci, de la cité Frais-Vallon (13e arrondissement). « Les jeunes du quartier à qui j’ai parlé m’ont dit “Pourquoi tu vas là-bas ? Ça sert à rien” », raconte-t-il. Ses copains évoquent aussi « la peur » que le meurtre de Mehdi a renforcée dans les quartiers populaires où le trafic marque son empreinte. « Quand tu dénonces le deal, on peut rapidement te traiter de balance », explique Mohammed, un autre pseudonyme, qui, en juillet 2025, a monté un collectif d’habitants pour chasser les trafiquants de la copropriété Bel-Ombre (11e). Cette peur paralysante a-t-elle aussi conduit à l’absence des stars du rap marseillais, Soprano, SCH ou Jul ?