Une époque où l’adjectif « sioniste » vaut insulte aux yeux d’un nombre important de personnes peut ne pas sembler idéale pour publier un roman qui revient aux origines de ce mouvement politique et pioche ses protagonistes parmi ses penseurs. Du point de vue du marketing, en tout cas. Mais, s’il s’agit de comprendre cette histoire, le moment n’est pas absurde pour s’intéresser aux racines du sionisme, aux espérances qui le portèrent, aux débats qui le façonnèrent.
En s’attelant à l’écriture de 22 Mapesbury Road, son premier livre, Rachel Cockerell n’a aucune idée du fait que le texte auquel elle songe aura le moindre rapport avec une actualité brûlante. Nous sommes en 2019, et la journaliste britannique, née en 1994, pense écrire un livre sur une histoire londonienne : comment sa grand-mère paternelle, Fanny, et la sœur de celle-ci, Sonia, ont élevé ensemble leurs sept enfants dans la même maison du nord-ouest de la ville, sise Mapesbury Road. « Et puis, je me suis demandé comment la famille était arrivée là, explique-t-elle par visioconférence au “Monde des livres”. Je savais que mon arrière-grand-père, dont le portrait trônait dans l’entrée de la maison, avait quitté l’Empire russe avec les siens à la veille de la première guerre mondiale. On me disait que c’était un homme d’affaires sur qui il n’y avait pas grand-chose à raconter. »