La capacité des poissons polaires à résister au froid extrême a inspiré une équipe de chercheurs en pharmacie moléculaire de l’université d’Utah (Salt Lake City, Etats-Unis). L’antigel qu’ils ont conçu, détaillé dans une publication de la revue Advanced Materials datée du 28 août, pourrait bouleverser ce secteur tout autant par sa puissance d’action à de petites concentrations que par son coût extrêmement faible.
L’autrice principale Jessica Kramer précise ainsi que les antigels développés « agissent à des concentrations de 1 000 à 10 000 fois plus faibles que celles couramment utilisées » et que dans l’alimentaire, par exemple, « ils sont élaborés à partir d’acides aminés naturels dont les composants coûtent en ligne moins de 25 dollars [22 euros] le kilo ».
Comme cela arrive parfois dans un laboratoire, c’est une autre recherche qui a mené fortuitement à cette innovation. « Nous étudiions à l’origine des protéines présentes dans le mucus, la salive et les larmes [qui lubrifient les tissus mais contrôlent aussi le passage des médicaments, des nutriments et des agents pathogènes] », explique la responsable du Kramer Lab, professeure adjointe en bio-ingénierie mais aussi spécialiste en pharmacie et chimie pharmaceutique. « Il s’est avéré que ces protéines sont structurellement apparentées à certaines protéines antigel de poissons. Nous avons ainsi découvert que les méthodes mises au point pour produire du mucus entièrement synthétique pouvaient être appliquées aux protéines antigel. »
Sans abandonner la recherche sur le mucus, l’équipe s’est alors donné comme objectif de développer des inhibiteurs de glace afin de prévenir la formation de gros cristaux « tels ceux qui altèrent la qualité des aliments surgelés, endommagent des médicaments vitaux ou peuvent poser problème sur les ailes d’avion, dans le béton et l’asphalte », énumère Jessica Kramer.