Au cœur de négociations de paix avec la Russie lancées sous une forte pression américaine, l’Ukraine traverse une période de bouleversement politique majeur, susceptible d’ouvrir la voie à des réformes dans la gouvernance du pays en guerre. L’homme de confiance de Volodymyr Zelensky, le chef de l’administration Andriy Yermak, a été emporté vendredi 28 novembre dans un scandale de corruption, trois semaines après que deux ministres (justice et énergie) eurent été démis de leurs fonctions pour leurs liens supposés dans l’affaire révélée par des enquêteurs anticorruption. Aucun successeur n’a pour le moment été désigné. Ces flottements amènent de plus en plus de voix critiques à demander une réorganisation des méthodes de gouvernement du président ukrainien.
Le départ d’Andriy Yermak était réclamé de longue date par de nombreux députés de l’opposition. Au-delà de l’affaire de corruption, dans laquelle il n’a pas été formellement accusé, ce pilier du camp Zelensky était considéré comme l’architecte de l’hyper-concentration des pouvoirs au sein de la présidence. Une méthode de gouvernement qui mettait de fait le Parlement sur la touche depuis le début de l’invasion russe. Le malaise était tel que de plus en plus de députés du parti présidentiel, Serviteur du peuple, avaient joint leurs voix à la fronde ces dernières semaines. Sans clore le dossier du scandale de corruption, la démission de celui qui, depuis son départ, s’est dit résolu à rejoindre « le front », a répondu aux attentes d’une partie des cercles politiques.
Si la population ukrainienne, déjà éprouvée par les longues coupures de courant quotidiennes dues aux frappes russes sur les infrastructures énergétiques, a été choquée de découvrir l’ampleur de la corruption dans les cercles proches du pouvoir, l’impact sur la popularité du président reste difficile à mesurer, faute de sondages récents. La dernière enquête de l’Institut international de sociologie de Kiev, réalisée en septembre et en octobre, lui donnait un taux de confiance de 60 %. Sa cote de popularité n’est jamais descendue en dessous des 50 % depuis le début de l’invasion. De fait, aucun parti politique ne conteste la légitimité de Volodymyr Zelensky. L’annulation des élections au printemps 2024 en raison de la loi martiale et de l’impossibilité d’organiser le scrutin en temps de guerre fait consensus.