« La réindustrialisation se fera à partir du terrain »

Dans la foulée d’une mondialisation qu’on voulait croire « heureuse » par-dessus tout, l’ensemble des politiques publiques et de l’imaginaire collectif européen s’est polarisé autour d’une vision simpliste de l’entreprise, qu’on a mythifiée autour de la réussite internationale et de la conquête des marchés extérieurs. Ce cycle d’ouverture a été gagné à marche forcée dans un pays traditionnellement plutôt replié, grâce à une génération d’entrepreneurs de référence qui avaient à cœur de concilier le développement français et l’affirmation économique mondiale, tels Claude Bébéar, Bertrand Collomb, Gilbert Trigano, Antoine Riboud, parmi beaucoup d’autres qui nous ont fait rêver en se projetant toujours plus loin, tout en stimulant la confiance dans notre société française.

Ce modèle passé contenait en lui-même des points de faiblesse qui vont se révéler être des failles béantes vingt à trente ans après : une pression croissante et sans pitié sur le tissu des fournisseurs, une limite à la capitalisation qu’on ira compenser par l’appel aux investisseurs étrangers et une gouvernance consanguine qui a cru qu’il existait un capitalisme équilibré pouvant se passer d’une modélisation européenne volontariste distincte du modèle américain.

L’implosion de ce cycle peut se dater dans les années 2010, sous l’effet de deux phénomènes fondamentaux : d’une part, la prise de pouvoir du modèle managérial par les Gafam, auxquels on a tout accordé, notamment une croissance sans règles ni concurrence au nom d’une avancée technologique que rien n’arrête, et, d’autre part, une abdication des Etats, signataires des « principes directeurs de la conduite responsable des affaires » à l’Organisation de coopération et de développement économiques, qu’ils se garderont d’appliquer du fait d’un effondrement éthique des dirigeants et d’une vision réduite au rendement financier, celui des fonds de pension au succès exponentiel, en s’en remettant au ruissellement, pour mieux contenir les appels croissants à une durabilité planétaire devenant trop exigeante pour leurs propres intérêts.

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