Il est coincé. Ligoté au fond de l’ornière de cette soirée. Il a beau fouiller le tiroir désigné, il n’y trouve plus que ses stylos. Il s’efforce de soulever les dossiers empilés sur son bureau, de regarder entre les pages si elle y est, pareil entre les coussins en cuir de son fauteuil, de tout retourner, le plus discrètement possible alors que tous déjà dansent et s’enivrent dans le couloir, à côté du sapin : pas de trace de la clé.
Il a du mal à y croire mais doit se rendre à l’évidence : son patron lui a fait ce coup-là. Ce soir. Il a pris la clé sans même se donner le mal de le prévenir. Alors que, malgré la terreur dans laquelle l’installe la simple idée de devoir lui parler, il lui avait expressément signalé, entre deux portes, à voix très basse, avoir besoin d’être chez lui ce soir.
Sans aller jusqu’à lui raconter le pourquoi du comment, le fait que, ce soir, il avait rendez-vous chez lui avec sa femme, que peut-être elle serait prête à le haïr un peu moins, voire à essayer de l’aimer à nouveau. Il ne lui avait pas dit, car il sait qu’il se fout de qui il est, de qui il aime, de s’il est triste et vide comme sa poche depuis que sa femme l’a quitté.