A peine descendu de l’avion, le pied tout juste posé sur le sol islandais, il occupe l’espace, capte toute l’attention. Intarissable moulin à paroles si autocentré qu’il ne se soucie jamais de ce que peut bien penser Anna (Saga Garoarsdottir), son interlocutrice, artiste contemporaine, mère de trois enfants, récemment séparée. Le galeriste suédois, venu jeter un œil à son travail, lui déverse son envie d’avoir un chien aussi grand qu’un poney, son admiration pour un peintre aux toiles cinq fois plus grandes que les siennes, sa théorie selon laquelle boire une bouteille de vin par jour, et non juste un verre, serait meilleur pour la santé. Ce, avant de repartir, quelques heures plus tard, non sans avoir au passage volé un œuf d’oie dans lequel il y a peut-être de la vie et avoir précisé que, de toute façon, il n’avait plus aucun espace à disposition.
L’Amour qu’il nous reste, quatrième long-métrage du réalisateur islandais Hlynur Palmason, trois ans après l’épique et âpre Godland (2022), est l’antithèse de ce personnage. Une œuvre accueillante, pleine de silence et d’attention, en empathie profonde avec la nature et le vivant, à commencer par un drôle de bestiaire fait de poules, d’oiseaux, de chevaux ou d’un chien nommé Panda, qui traversent avec une présence généreuse tout le film.