Les brèves critiques du « Monde des livres » : Annie Ferret, Paul Fournel, Gérard Mordillat, Catherine Zittoun…

Des romans, un récit, un recueil de nouvelles… Voici les brèves critiques de sept ouvrages notables en cette vingt-huitième semaine de l’année.

Le camion du kolkhoze est venu chercher la mère pour l’emmener accoucher. Puis le père a ramené l’enfant chez eux, une petite fille qu’il avait attachée sur sa luge. Deux cents pages plus loin, la fillette, devenue jeune femme, s’apprête à quitter son village natal. Mais entre-temps, sur un ton alerte et allègre, elle nous aura fait ­vivre toute sa jeunesse dans une famille moldave au temps de l’Union soviétique…

Pour ce premier roman, la poète Lorina Balteanu a trouvé une forme littéraire adéquate : l’histoire progresse par courtes saynètes, vivantes et visuelles, derrière lesquelles se profile subtilement la grande histoire. Comme dans cette description du rituel du 9 mai – le jour de la victoire contre l’Allemagne nazie en URSS – où la mère sort les médailles du père et les frotte au bicarbonate de soude pour les faire briller. La petite fille explique : « De la guerre, Papa est revenu avec deux médailles sur la poitrine et une balle dans la hanche. Les médailles, il les a mises au fond d’un tiroir, mais la balle, il la porte toujours sur lui. » Comme elle le fait souffrir dans son sommeil, les enfants, une nuit, conçoivent le projet de l’extirper de son corps avec un aimant… Alliant gravité et fantaisie, ce récit réussi appelle une suite : celui du voyage tant rêvé de l’héroïne dans le vaste monde. Fl. N.

Ecrivaine et modèle d’art, Annie ­Ferret a publié, entre autres, des ­contes inscrits dans « une Afrique ­rêvée » et un roman, Les Hyènes (Grasset, 2021), explorant la transmission de la colère sur cinq générations de femmes. Un riche univers convoqué dans Un petit miracle. Cette fiction se déploie en Amérique latine. Portée par une voix narrative qui tutoie le protagoniste, Juan, l’intrigue remonte le fil des événements qui ont conduit en prison ce père au chômage. Sa faute ? Avoir rapporté à la police une valise qui n’était pas la sienne, à la suite d’un cafouillage à l’aéroport. Avoir vu son frère mort dans les yeux de l’Indien à qui il a cédé sa place dans l’avion. Avoir survécu au crash de l’appareil. Ou, pire, avoir espéré être heureux. En s’emparant des codes du réalisme merveilleux, dans une langue chargée d’amour, Annie Ferret écrit au plus près des tourments intimes échappant à nos regards. Gl. Ma.

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