Au moment de confirmer le rendez-vous, on avait omis de demander à Jamal Valizadeh comment le reconnaître. Le jour venu, parmi les piétons qui déambulent sur le parvis de la gare de Metz, quelques secondes suffisent à repérer l’athlète de l’équipe olympique des réfugiés, qui concourra le lundi 5 août sur le Champ-de-Mars, dans l’Arena bâtie pour les Jeux de Paris. Son gabarit de lutteur donne un premier indice, mais c’est surtout son pas pressé qui détonne dans la foule. Les deux camarades de faculté qui l’accompagnent, cet après-midi de juin, peinent à suivre son rythme.
Alors que l’échéance olympique approche, le pugiliste n’a pas de temps à perdre et multiplie les entraînements. Une session chaque matin, centrée sur la préparation physique, dans une pièce de son appartement en périphérie messine aménagée en salle de sport. On y trouve cage de musculation, body trainer, banc et haltères. Une autre, chaque après-midi, axée sur la technique, le plus souvent en Allemagne, à Sarrebruck (Sarre), à une heure de voiture de là, dans le club de son principal partenaire de tapis, l’Allemand Etienne Kinsinger.
Ces dernières semaines, il a baissé la cadence – douze séances hebdomadaires, au lieu des quatorze habituelles –, pour laisser son corps récupérer d’une déchirure musculaire qui le fait grimacer dès qu’il tourne le torse.
« Il y a quelques jours, j’avais du mal à respirer, le jour de ma soutenance de master en MIM [pour mathématiques, informatique et mécanique], confie le sportif tendance stakhanoviste. Le prof m’a proposé de reporter l’examen, mais j’ai refusé. Je veux être traité comme les autres. » La remarque ne surprend pas son ami Oleksandr Stetsenko, un Ukrainien de huit ans son cadet, rencontré sur les bancs de l’université de Lorraine, en 2019. Oleksandr suit le même cursus que lui et l’aide à combler son retard lorsque le rythme devient intenable : « Parfois, il est tellement fatigué qu’il s’assoupit en cours. Il n’arrête jamais. » « Mes vacances, ce sont les stages de préparation ou les tournois », ironise Jamal Valizadeh.
Un autre détail, vestimentaire celui-ci, laisse entrevoir le goût du défi de cet athlète né dans la province kurde de Kermanchah, dans l’ouest de l’Iran, au pied des monts Zagros. Son tee-shirt porte l’inscription « Los Angeles », la ville-hôte des Jeux olympiques (JO) qui suivront ceux de Paris. « Ça ne me déplairait pas, de préparer les Jeux 2028 », fait l’intéressé dans un sourire, avant d’ajouter, plus lucidement : « Mais, à 32 ans, je suis plutôt en fin de carrière. »