Paris 2024 : de Toulouse au « rêve américain », le destin de Léon Marchand, l’héritier surdoué de la natation et désormais champion olympique

Et soudain, des lueurs virides envahirent la Ville rose. Quand il se remémore l’anecdote, Michel Coloma laisse poindre une malice enfantine dans le regard, sous ses sourcils blancs broussailleux. Le directeur général des Dauphins du Toulouse Olympique Employés Club (TOEC) a convaincu sa municipalité d’illuminer la façade du Capitole en vert et blanc, les couleurs emblématiques du club de natation d’Occitanie. Non sans donner quelques sueurs aux services techniques. « Ils avaient mis du violet en l’honneur du Téfécé [Toulouse FC], du rouge et noir pour le Stade toulousain. Je leur ai fait la remarque, ils m’ont dit : “Mais vous êtes fou !” », raconte-t-il, pas peu fier de son « coup ».

Fin juillet 2023, Toulouse célèbre Léon Marchand. L’enfant du pays vient de repartir de Fukuoka (Japon) avec trois titres de champion du monde, sur 400 m 4 nages – record du monde à la clé –, 200 m 4 nages et 200 m papillon. Ses exploits méritaient bien de remuer ciel et terre pour dénicher quelques ampoules vertes : « Je leur ai dit : “Gardez-les pour les Jeux olympiques !” », poursuit, dans un sourire entendu, le dirigeant de 58 ans dans son bureau sur l’île du Grand-Ramier, où se niche aussi le Stadium du TFC.

« Moi mon océan, c’est une Garonne », chantait Claude Nougaro. C’est entre les deux bras du fleuve jadis capricieux que Léon Marchand a pris sa première licence de natation, à 6 ans. Au départ, il barbote dans le petit bain de la piscine d’hiver Alfred-Nakache, bijou Art déco classé aux Monuments historiques. Puis, plus tard, il investit le bassin olympique du complexe – qui abrite aussi une gigantesque piscine d’été de 150 mètres de long, longtemps la plus grande d’Europe –, avant de s’exiler à 19 ans de l’autre côté de l’Atlantique.

Dans le hall du club, la présence de l’enfant prodige est à l’image du plus doué des 1 700 licenciés (pas le plus célèbre : le champion du monde 1998, Fabien Barthez, vient nager presque tous les jours) : discrète. Il y a bien ces deux « unes » de L’Equipe au fond d’une modeste vitrine, où trônent des bonnets et une poignée de produits dérivés. Sur le mur au-dessus de la machine à café, son portrait encadré n’en impose pas beaucoup plus que ceux des autres nageurs du groupe élite, ou que ceux en noir et blanc de leurs lointains prédécesseurs. Sans doute plus pour longtemps…

Dimanche 28 juillet, en décrochant la médaille d’or sur sa course fétiche, le 400 m quatre nages (4 min 02 s 95), et en faisant tomber le record olympique de la légende Michael Phelps (4 min 03 s 84), le nageur de 22 ans a écrit un nouveau chapitre à l’encre dorée, dans le sillage de ses glorieux aînés toulousains Alex Jany, Alfred Nakache ou encore Jean Boiteux, premier champion olympique de l’histoire de la natation française (en 1952, à Helsinki). « Il va peut-être répéter l’histoire de Jean Boiteux, c’est fou. Personne n’aurait pu imaginer un tel destin », disait au printemps Michel Coloma, qui l’a connu au berceau.

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