En Méditerranée, les bonnes fées sous-marines des coraux

A la surface de l’eau, les sons ricochent. Ce jour-là, la baie de Toulon résonne des cris des régatiers s’écharpant à la bouée, des rires des enfants sur leur dériveur, des moteurs des vedettes rapides… Entre la passe de Pipady et la presqu’île de Giens, qui cache Porquerolles, l’imposante masse du Dixmude, porte-hélicoptères amphibie de 199 mètres de longueur, fait des ronds dans l’eau. Comme un écho des fracas du monde.

A quelques centaines de mètres, Poisson-Vole, un pneumatique rapide, tape sur les vagues. Direction l’anse de Sainte-Marguerite. A la barre, combinaison néoprène enfilée sur les jambes, et pull à capuche, la monitrice de plongée et défenseuse de la faune sous-marine Sandrine Treyvaud hurle. « Ça bouge trop, on va commencer par faire un inventaire ! » Chacun vérifie son équipement, sa bouteille et son détendeur, mais aussi la plaquette et le stylo sous-marins, le mètre ruban, l’ordinateur de plongée. Les mots sont étouffés par le feulement du hors-bord.

Sous la surface, soudain, le silence de la mer… En duo, entourés de bulles d’oxygène, les plongeurs descendent vers les herbiers de posidonie, longent les rochers recouverts d’éponges orange, de padines et de codiums en boule (des algues). Ici, la nature semble intacte. Pas comme au pied du tombant de l’anse du Fer-à-Cheval, situé juste au-dessous d’une route, où l’on retrouve des pneus et, parfois, des carcasses de voiture.

A 11 mètres, le premier Cladocora caespitosa paraît. Sphérique, brun vert, plus discret que ses cousins tropicaux. Une plongeuse le mesure précautionneusement pour ne pas écraser les tentacules des polypes qui attrapent le plancton en suspension. Et un autre participant scrute et note. Les dimensions : 21 centimètres par 18 ; la profondeur ; l’état de conservation, de « + + + » à « – – – », selon le nombre de polypes abîmés ou blanchis. Celui-ci sera noté « ? ». Colonie après colonie, le recensement se poursuit. Quelques gestes pour montrer, se diriger. Les coups de palmes font fuir les poulpes en pleine période de reproduction. Pas les bancs de labres, qui restent impassibles.

Ici, certains coraux découverts ne sont plus anonymes. Depuis sept ans qu’elle a fondé Ocean Quest France, une association de protection et de restauration, Sandrine Treyvaud en a baptisé certains « des noms de copains, d’enfants et de petits-enfants ». Alors, il y a « Charlie », comme la petite-fille du président de l’ONG. Dans la pente, il y a aussi « Oli », boule de polypes de 42 centimètres par 30. « Il va mieux, ça fait plaisir de le voir reverdir… », confie la plongeuse. Il y a trois ans, au mois d’août 2022, cette colonie a subi une canicule marine. Pendant trois semaines, l’eau de surface a atteint des températures record, jusqu’à 26 °C. Au-delà de 24 °C, les Cladocora caespitosa commencent à expulser les algues qui vivent en symbiose avec eux.

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