Cinq romans, un récit, un essai d’histoire, un autre de philosophie… Voici les brèves critiques de huit ouvrages notables en cette première semaine de l’année.
Roman rêveur et languide, Le Ciel de Tokyo évoque les instants suspendus qu’ont vécus, au début des années 2000, les locataires de la Gaijin House. Dans cette pension minable réservée aux étrangers résidant quelques jours ou quelques mois dans la capitale japonaise se croisent étudiants, routards, touristes et expatriés. Loin de leur pays d’origine et comme en congé d’eux-mêmes, ils prennent volontiers leur parti de la « laideur » et de l’inconfort des lieux, y voyant l’occasion de laisser libre cours à leur propre « flottement identitaire ».
Il ne se passe pas grand-chose dans ce troisième livre d’Emilie Desvaux. Point d’événement spectaculaire ou de véritable péripétie, si ce n’est l’arrivée ou le départ de nouveaux habitants. Pourtant, le lecteur n’a aucun mal à se laisser happer par le quotidien informe de Camille, Flavio, Lénine ou Marvin. Dans ce roman d’atmosphère, la romancière réussit à rendre sensible le lent processus de familiarisation des êtres avec les lieux, lequel accompagne l’intimité qui naît peu à peu entre les locataires. Interrogeant le statut que conservera dans la mémoire de ceux qui l’ont vécue cette période aux contours incertains, elle en fait une aventure intérieure pour chacun. Bien que le souvenir de cette pension vieillotte du nord-est de Tokyo ne laisse rien « à la surface de l’âme qu’une pellicule graisseuse extrêmement fine, comme une patine », la plume d’Emilie Desvaux lui redonne un lustre vivifiant. Fl. By