Sur une estrade, confortablement assis, le professeur délivre doctement ses connaissances. Au premier rang, des étudiants boivent ses paroles, tandis que d’autres suivent attentivement le cours dans un ouvrage. Mais, dès le deuxième rang, l’attention commence à décliner : certains sont plongés dans leurs pensées, d’autres, derrière, discutent sans vergogne ou regardent ailleurs. Là-bas, un étudiant s’est même assoupi…

La scène n’a pas lieu en 2025 dans l’amphithéâtre bondé d’une fac française, mais à l’université de Bologne, à la fin du Moyen Age. Peint vers 1350 par un certain Laurentius de Voltolina, le tableau Henricus de Alemannia con i suoi studenti (« Henricus de Alemannia et ses étudiants ») est bien connu des spécialistes de la pédagogie et des universitaires se questionnant sur la pertinence du cours magistral (CM).

Ennuyeux, trop « descendant », déconnecté des besoins des étudiants, qu’il laisserait trop passifs, responsable de l’échec des plus fragiles : que n’a-t-on pas dit de ce mode d’enseignement depuis des décennies !

Pourtant, après une crise due au Covid-19 ayant fait tanguer encore un peu plus ce totem de l’enseignement supérieur, le retour au « présentiel » et au cours magistral en amphi fut presque une délivrance pour nombre d’étudiants et d’enseignants. Avant que ne reviennent les éternels questionnements sur l’ennui en cours ou le manque d’attention…

Début janvier, Otavio Amaral, 30 ans, est justement « passé de l’autre côté », comme il dit. Ce doctorant en anthropologie sociale a commencé à donner un cours magistral en amphi à l’université d’Amiens, en tant que chargé de cours pour des L2 (deuxième année de licence) de sciences sociales. « C’est toujours un moment important et un accomplissement dans la carrière d’un universitaire », concède-t-il. Mais il a découvert que, « avec une centaine d’étudiants devant soi, parfois beaucoup plus, il est très difficile d’échanger, de les faire participer et de noter cette participation ».