Le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, « ne voit pas de raison de quitter » le gouvernement, même s’il « n’abdiquera pas ses convictions » après la polémique créée par ses attaques contre le chef de l’Etat dans une interview au magazine ultraconservateur Valeurs actuelles.
« Tant que les décisions [du gouvernement] sont conformes à l’intérêt national, conformes à mes convictions, il n’y a pas de raison que je quitte le gouvernement », a-t-il déclaré, jeudi 24 juillet, lors d’un déplacement dans un commissariat. « Tant que je peux faire mon devoir, je le ferai à fond », a-t-il répété, mais « ne comptez pas sur moi pour abdiquer mes convictions ».
Le débat sur le supposé double jeu du patron des Républicains, à la fois ministre d’Emmanuel Macron et critique de son action pour s’en différencier en vue de l’élection présidentielle de 2027, avait repris de la vigueur après une virulente interview mardi à l’hebdomadaire Valeurs Actuelles.
Dans celle-ci, M. Retailleau critique « l’impuissance » du « en même temps », postulat du chef de l’Etat, qui revendique d’être à la fois de droite et de gauche, et prédit la fin du macronisme avec Emmanuel Macron, parce qu’il « n’est ni un mouvement ni une idéologie ».
De quoi excéder les soutiens du président et faire monter les tensions avec celui-ci. Les deux hommes devaient se rencontrer jeudi pour discuter notamment de l’Algérie, déjà un sujet de discorde après une autre récente interview du ministre, dans laquelle il avait fustigé la « diplomatie des bons sentiments » de Paris à l’égard d’Alger. Mais la rencontre a été annulée par l’Elysée, qui n’a pas fourni d’explications.
« Cette rencontre sera sans doute remise parce qu’on a, avec le président de la République, un certain nombre de sujets dont on doit parler. Et donc je serai amené à le rencontrer, peu importe la date ou l’heure », a relativisé M. Retailleau.
En revanche, il verra jeudi soir le premier ministre, François Bayrou, « sur les différents dossiers » le concernant, selon un proche d’Emmanuel Macron. Pour un recadrage ? « Je suis toujours prêt à discuter », a assuré M. Retailleau.
Même « s’il peut y avoir des moments de tensions, parce qu’on n’a pas des accords sur tout », le ministre a nié que le conseil des ministres mercredi ait été marqué par une ambiance fraîche, comme l’ont relaté certains participants dans la presse. « Il s’est déroulé absolument normalement. Il ne faut pas grossir les choses (…) J’entends aussi qu’on me respecte. Il y a des ministres qui m’ont critiqué sur telle ou telle mesure depuis des mois. M’avez-vous entendu leur faire le moindre reproche ? », a-t-il plaidé.
En attendant le rendez-vous avec le premier ministre, M. Retailleau a tenu à montrer qu’il continuait son action et s’exprimait toujours de « façon brute » en présentant un plan antimortiers après les scènes de « guérilla urbaine » vues ces dernières semaines à Béziers (Hérault), Limoges ou Charleville-Mézières.
Fidèle à ces formules-chocs outrancières sur les jeunes commettant des actes de délinquance, déjà qualifiés de « barbares » après les dégradations commises à Paris lors de la finale de la Ligue des champions, il s’en est pris à « la France des salauds qui tirent sur nos policiers, sur nos gendarmes et sur nos sapeurs-pompiers ».
Il a annoncé pour la rentrée un projet de loi pour que « la pénalisation de la vente d’engins pyrotechniques à des non-professionnels soit punie d’un an d’emprisonnement [au lieu de six mois], voire trois ans, si le produit a été vendu à un mineur ou au moyen d’un service de communication électronique ». L’achat, la détention et l’utilisation de ces engins seraient punis « de trois ans d’emprisonnement, voire cinq ans, si l’objectif est de détruire ou de détériorer le bien d’autrui ».