C’est une première. La 4e circonscription de la Drôme, où résidait Thomas, l’adolescent de 16 ans tué à la sortie d’un bal à Crépol, dans la nuit du 18 au 19 novembre 2023, a élu un député Rassemblement national (RN), Thibaut Monnier. Celui-ci a réuni 42 % des suffrages, battant ses concurrentes, Isabelle Pagani (Nouveau Front populaire, 32,1 %) et Emmanuelle Anthoine (Les Républicains, 26 %). Une victoire rendue possible, aussi, par l’absence de front républicain dans la circonscription, la candidate Emmanuelle Anthoine ayant maintenu sa candidature au second tour.
Le parti d’extrême droite n’était jamais arrivé au second tour des législatives dans la circonscription avant le 7 juillet. Le vote RN avait été stable aux trois dernières législatives, en 2012, 2017 et 2022, se situant entre 17,3 % et 20,4 % des voix. D’où la surprise de ce score au premier tour des législatives, 18 points au-dessus des précédents (38,4 %).
Difficile de dire si le contexte local a contribué à la victoire du RN dans la circonscription. En novembre 2023, une marche blanche avait réuni 6 000 personnes à la suite du meurtre de Thomas. Le week-end des 26 et 27 novembre 2023 avait donné lieu à de violents affrontements entre jeunes identitaires et forces de l’ordre à l’entrée de la cité de la Monnaie, à Romans-sur-Isère (Drôme), les premiers cherchant à mener une expédition punitive pour « venger Thomas » dans la cité où résidaient certains des accusés du meurtre. L’affaire avait pris une ampleur nationale. Certains y voyaient un « meurtre anti-Blanc » et d’autres le résultat d’une « rixe », un affrontement entre bandes rivales.
A Crépol, la ville où résidait Thomas, le taux de participation a été extrêmement fort (74,8 %), le choix des votants se portant clairement sur le RN (48,5 %), malgré la triangulaire. Mais « le nord de la circonscription a toujours voté RN », rappelle Isabelle Pagani, la candidate de gauche défaite.
Le nouveau député Thibaut Monnier est un vieux compagnon de route de Marion Maréchal. Ils ont cofondé l’Institut des sciences sociales, économiques et politiques (Issep), à Lyon, une école privée destinée à former des cadres d’extrême droite. Depuis sa création en 2018, l’école enchaîne les difficultés : peu d’inscrits, finances précaires, absence de reconnaissance du diplôme de l’Issep par l’Etat… Certains de ses intervenants sont forcés d’offrir leurs services bénévolement. Un professeur d’histoire d’origine russe, Oleg Sokolov, a été limogé après sa condamnation pour le meurtre de sa compagne.