Novozybkov, la « kommandantur » de Donetsk, l’internement en Mordovie… La liste des prisons russes où le fusilier marin Yulian Pylepei a été détenu entre le 14 avril 2022 et sa libération, le 13 septembre 2024, pourrait presque être dressée en suivant ses cicatrices. Sur le front, c’est « une morsure de chien, dans la prison de Koursk, explique l’Ukrainien de 30 ans. Le nez cassé, la jambe brisée, c’était là-bas aussi ». Les traumatismes crâniens sont invisibles, mais datent d’un peu plus tôt, comme les lignes blanches sillonnant ses avant-bras, la trace de chocs électriques. Que l’œil s’arrête sur sa bague tactique en silicone noir et Yulian se sent obligé de préciser : « A Olenivka, ils m’ont pris mon alliance. J’ai tenté de les arrêter en leur disant : “C’est sacré !” Réponse : “Tu la donnes ou on te coupe le doigt.” »

« Longtemps, j’ai répété : “Un marine ne pleure jamais.” Mais quand, le jour de ma libération, on m’a passé un téléphone et que j’ai entendu la voix de ma femme, j’ai pleuré comme un enfant », lâche l’ancien détenu. Nous le rencontrons à Lviv, au pied de son immeuble (sa femme n’aime pas l’entendre raconter ses tortures), après un rendez-vous chez le psychiatre. Muscles larges, trident en pendentif sur tee-shirt blanc, il explique qu’il a pris l’habitude d’aller accueillir d’autres prisonniers de guerre à leur retour. « Nous parlons ensemble des prisons où ils sont passés, des détenus qu’ils ont croisés, de bien d’autres choses encore. Je les comprends mieux que personne, et inversement. »

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