Une grosse larme roule sur sa joue quand elle raconte sa rupture, même quatorze ans plus tard. Depuis, Adeleye Olaide a réalisé son rêve de devenir infirmière militaire, a décroché un poste à Lagos, la capitale économique nigériane, s’est mariée, a eu un fils. Mais parler de Tunde, son premier amour, la meurtrit encore. « Il était tout ce dont une femme a besoin chez un homme. La seule chose qui posait problème, c’était son génotype », dit-elle à propos de leurs gènes trop semblables. Après des années d’amitié, puis de relation amoureuse, de projets de mariage et d’enfants, c’est ce patrimoine héréditaire qui a sonné la fin de leur idylle, en 2011.
Adeleye et Tunde sont porteurs d’une mutation génétique qui touche un quart des 232 millions de Nigérians, la plus grande population d’Afrique. Soit quelque 50 millions de personnes. Les « AS », comme tout le monde les désigne, sont des porteurs sains de la drépanocytose – une maladie de l’hémoglobine entraînant une anémie et une déformation des globules rouges qui, au lieu d’être ronds et bombés comme des donuts, prennent une forme de faucille. Leur santé est normale, sans symptômes. Cette particularité génétique a même tendance à les protéger du paludisme, un fléau dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.