Dans une Amérique en proie aux menées liberticides de son président, certaines interventions dans le débat public deviennent des armes de résistance intellectuelle. C’est le cas notamment d’un petit ouvrage publié il y a huit ans par Timothy Snyder, De la tyrannie. Vingt leçons du XX? siècle, traduit en France chez Gallimard.

Paru initialement dans sa version originale anglaise en février 2017 – un mois après l’entrée en fonctions de Donald Trump pour son premier mandat –, l’ouvrage avait rencontré un succès immédiat. L’historien, auteur d’essais érudits sur la Shoah, tel Terres de sang (Gallimard, 2012), avait profité de son intime connaissance des totalitarismes pour rédiger ce texte dans lequel il partage avec ses concitoyens 20 conseils pour ne pas céder face à l’autoritarisme. Il propose notamment de « ne pas obéir à l’avance », de « se méfier des paramilitaires » ou encore de « défendre les institutions ».

Ce programme trouve aujourd’hui un nouvel écho, poussant De la tyrannie au sommet des meilleures ventes dans les classements établis par The New York Times et Amazon. Il s’est désormais écoulé à plus de 1,4 million d’exemplaires aux Etats-Unis. Plusieurs libraires indépendants remarquent un intérêt renouvelé des lecteurs pour le livre. En juillet, le Publishers Weekly relatait notamment que « la forte hausse des ventes, malgré un faible volume, au cours des six premiers mois de l’année ne montre aucun signe d’essoufflement ».

Ces ventes laissent même espérer que les ingénieurs de la tech ne sont pas tous séduits par la nouvelle administration. A Menlo Park (Californie), où est situé le siège social de Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp), le patron d’une librairie note même que certains de ses clients ont acheté plusieurs exemplaires de ce livre, sans doute pour le distribuer à des proches. De la tyrannie s’installe ainsi, à bas bruit, comme la référence vers laquelle se tournent les Américains pour penser leur opposition à Trump.