Au printemps 1982, étudiants et chercheurs se pressent à l’université de Dakar pour écouter le célèbre Cheikh Anta Diop (1923-1986). L’auteur de Nations, nègres et cultures (Présence africaine, 1965) fascine autant qu’il divise ses contemporains. Dans la foule dense, un adolescent ne perd pas une miette du discours pionnier de l’intellectuel sur l’Egypte antique peuplée de Noirs et la diffusion de la langue et de la culture égyptiennes en Afrique de l’Ouest : David Diop, 16 ans. « J’ai été extrêmement impressionné par ses propos sur l’Egypte ancienne, se souvient le romancier lors d’un entretien accordé en septembre au “Monde des Livres”. Je pense que je mûris, à l’insu de ma conscience, un sujet de livre sur l’Egypte depuis ce jour-là. »
Où s’adosse le ciel, qui entrelace le voyage de Bilal Seck – un pèlerin sénégalais survivant d’une épidémie de choléra à La Mecque, à la fin du XIXe siècle – avec le récit de l’exil en masse d’Egyptiens vers l’ouest du continent africain au IIIe siècle av. J.-C., est le fruit de cette longue maturation. Si l’idée vient de loin, ce n’est cependant qu’en 2021, et après avoir publié deux romans (Frère d’âme, Goncourt des lycéens 2018, et La Porte du voyage sans retour, 2021, tous deux au Seuil), que l’universitaire, spécialiste des littératures du XVIIIe siècle, commence un intense travail de documentation. Il fait des recherches comme jamais auparavant, plongeant dans les travaux de l’égyptologue Aboubacry Moussa Lam, avec la crainte de se perdre dans cette histoire égyptienne immense.