A défaut d’avoir remporté le match face à l’ordre établi du football européen, les tenants de la Super Ligue enchaînent les victoires devant les tribunaux. Même si celles-ci semblent intervenir après la fin de la partie. Un tribunal de Madrid a confirmé en appel, mercredi 29 octobre, que l’Union des associations européennes de football (UEFA) avait « abusé de sa position dominante » au printemps 2021 en tentant de bloquer la création d’une compétition privée – quasi fermée, puis semi-fermée, dans son évolution – pensée pour concurrencer la Ligue des champions.
La Super Ligue a été officiellement lancée, par un communiqué, un dimanche d’avril 2021, à minuit. Projet de douze clubs sécessionnistes, menés par le Real Madrid, le FC Barcelone et la Juventus Turin et réunissant certaines des plus grandes équipes d’Europe, ce qui se présentait comme une révolution visant à « sauver le football » – et, surtout, à en maximiser les revenus –, en en remodelant « la pyramide » s’était promptement transformé en révolte avortée. L’initiative avait provoqué une réaction hostile tant des supporteurs, des politiques – notamment au Royaume-Uni – que des instances régissant la discipline.
Face aux menaces de sanctions brandies par l’UEFA, les ligues nationales et la Fédération internationale de football association (FIFA), la plupart des formations rebelles étaient rentrées dans le rang. Une approche à nouveau sanctionnée, mercredi, par la justice espagnole. « L’UEFA et la FIFA ont abusé de leur position dominante (…) en s’attribuant le pouvoir discrétionnaire d’interdire la participation [des clubs] à des compétitions alternatives », précise le parquet de Madrid dans un document cité par l’Agence France-Presse.
Estimant que les deux instances « [ont] entrav[é] la libre concurrence sur le marché en imposant des restrictions injustifiées et disproportionnées à la Super Ligue », cette décision en appel confirme celle prise en mai 2024 et s’appuie sur un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne de décembre 2023. Celle-ci avait jugé que l’UEFA et la FIFA, qui s’opposaient à la création d’une compétition rivale et avaient menacé d’exclusion des compétitions internationales les clubs et joueurs qui y participeraient, avaient exercé un monopole contraire au droit européen sur la liberté de concurrence.
Le Real Madrid, l’une des équipes à l’origine de la Super Ligue et parmi les dernières à encore soutenir le projet publiquement, s’est réjoui d’une nouvelle victoire « [ouvrant] la voie à réparation pour les importants préjudices subis par le club ». Dans un communiqué, la formation présidée par Florentino Pérez « se félicite » de la décision du tribunal madrilène. Assurant avoir eu « de nombreuses conversations avec l’UEFA pour chercher des solutions », en vain, l’écurie aux quinze couronnes en Ligue des champions affirme qu’elle « continuera d’œuvrer pour le bien du football mondial et des supporteurs ».
Désormais promue par la société A22 Sports Management et ayant remodelé son format de compétition pour répondre aux critiques, la Super Ligue, qui assurait initialement pouvoir convertir les « jeunes qui ne sont plus intéressés par le football », défend désormais un modèle de « retransmission gratuite » et accessible au niveau mondial.
Reste que si la décision de mercredi ouvre la porte à un nouveau procès, lié à d’éventuelles réparations réclamée par le Real Madrid et consorts, sa portée demeure incertaine sur le plan sportif. Surtout, l’avènement d’une nouvelle compétition rivale de la Ligue des champions reste plus qu’hypothétique. Car en juin 2022, l’UEFA a adopté un nouveau règlement bien plus détaillé, corrigeant la « lacune » dans laquelle s’étaient engouffrés les clubs sécessionnistes.